Ca alors, mais revoilà le boyard Artem ! Depuis le temps que je ne l’avais pas vu, je le croyais mort, ma parole ! Et oui car Le sang d’Aphrodite est le 8° épisode d’une série de la collection Grands détectives dont le tome 7 était paru en 2003. J’ai lu les précédentes aventures d’Artem quand elles sont parues, cela fait donc quelque temps et j’ai retrouvé ce héros avec plaisir.
Nous sommes à Tchernigov en 1074, sur les terres du prince Vladimir. Successivement plusieurs jeunes femmes de bonne naissance sont assassinées et leur corps est mutilé de façon horrible. La seule trace de l’assassin : un parfum capiteux que l’on sent encore sur les victimes, le sang d’Aphrodite. Le boyard (noble) Artem, membre de la droujina (armée) et conseiller du prince, mène l’enquête. Pour cela il est aidé de Philippos, son fils adoptif, d’origine grecque et qui à 16 ans connaît ses premiers émois amoureux et des varlets (jeunes guerriers) Mitko et Vassili, ses collaborateurs.
Comme souvent dans cette collection, ce que j’apprécie ce n’est pas tant l’enquête policière qui n’offre pas de surprise particulière mais plutôt les personnages sympathiques et la reconstitution de l’ambiance de l’époque qui passe par l’utilisation d’expression typiques (« N’ordonne pas de me châtier mais ordonne de me pardonner » quand on s’adresse à plus haut que soi). Ce qui m’intéresse dans cette série c’est de découvrir le mode de vie raffiné des nobles russes. La région de Kiev est en relations avec l’empire byzantin; marchands, produits, modes circulent entre Tsargorod (Byzance) et l’Ukraine. Une lecture plaisante donc.
Journal d’un médecin polonais, 1939-1947 En 1919 Zygmunt Klukowski s’installe à Szczebrzeszyn, petite ville de Pologne près de Zamosc dans l’est du pays. Agé alors de 34 ans il y prend la direction de l’hôpital. En 1939, quand débute la seconde guerre mondiale, Zygmunt Klukowski est toujours directeur de l’hôpital de Szczebrzeszyn. Il décide alors de tenir un journal des événements. Bibliophile passionné, propriétaire de nombreux ouvrages, il a, dès le départ, l’intention de réunir des matériaux pour pouvoir plus tard écrire l’histoire de la région pendant la guerre. Il fait donc oeuvre d’historien, recoupant et vérifiant ses informations. Le résultat est le récit poignant des souffrances des populations locales sous la botte nazie puis soviétique. Croyez-moi, à côté de ça, l’occupation de la France c’était de la plaisanterie.
La rue de Szczebrzeszyn où se trouve l’ancien hôpital du dr Klukowski porte aujourd’hui son nom.
Les Juifs sont les premières victimes des nazis. Ils sont d’abord discriminés, harcelés, déportés puis exterminés. Zygmunt Klukowski note les exécutions sommaires dans la rue (il y avait une importante communauté juive à Szczebrzeszyn) et constate avec répugnance que certains Polonais participent de bon coeur aux persécutions.
L’occupation allemande de la Pologne entraîne des déplacements de population à grande échelle, pas seulement des Juifs. La région de Zamosc était la région d’Himmler. Il avait le projet délirant d’évacuer les populations polonaises de l’ensemble du district de Zamosc (rebaptisée Himmlerstadt) afin d’y implanter 60 000 colons allemands. Fin 1942 commence la mise en oeuvre de ce plan. Des jeunes gens sont capturés et envoyés au travail forcé en Allemagne. Des jeunes enfants sont enlevés à leurs familles et placés dans des familles allemandes pour y être germanisés. En 1942-1943 les Allemands ont ainsi évacué complètement ou partiellement 300 villages et déplacé environ 100 000 personnes, beaucoup vers des camps de concentration dont un à Zamosc. Les personnes d’origine allemande (même lointaine), les Volksdeutsch, sont invités à s’inscrire sur la Volksliste et obtiennent des avantages. Les médecins de l’hôpital de Szczebrzeszyn subissent des pressions pour s’inscrire sur la Volksliste. La plupart refusent.
A Zamosc, sous le porche de la cathédrale, une plaque en mémoire des enfants polonais déportés.
Les intellectuels sont emprisonnés ou exécutés. Zygmunt Klukowski se cache pour écrire et tremble pour ses livres. Face à toutes ces exactions le sentiment national polonais se renforce (en tout cas chez notre auteur) et la résistance se développe. Des collaborateurs sont exécutés. Il y a aussi du banditisme et on se fait dévaliser chez soi sans savoir si c’est par des brigands ou par des hommes de la forêt (les partisans), qui sont parfois les mêmes. Zygmunt Klukowski apporte son soutien à la résistance. Il reçoit ses officiers chez lui, son jeune fils sert de porteur de messages.
A l’été 1944 les Allemands quittent la région devant l’avancée soviétique. C’est une autre occupation qui commence alors. Les résistants qui refusent d’intégrer l’armée Berling (unités soviétiques polonaises) sont pourchassés et enrôlés de force. Les officiers récalcitrants sont déportés ou exécutés. Un couvre-feu est ordonné, il faut déclarer les machines à écrire et l’hôpital est fouillé comme jamais il ne l’avait été par les nazis. Petit à petit la lassitude gagne les derniers combattants qui se tournent vers le banditisme.
Le journal de Zygmunt Klukowski se termine fin 1945 au moment où le nouveau pouvoir se met en place. Il constate que la nouvelle administration de la région est en partie composée de quasi-illétrés. Il est très occupé par l’édition de ses témoignages sur la région pendant la guerre. Il faut pour cela contourner la censure. Son travail lui vaut, en 1947, d’être convié comme témoin au procès de Nüremberg. C’est le journal de cette expérience qui clos l’ouvrage. Zygmunt Klukowszki est mort à Szczebrzeszyn en 1959.
Un ouvrage très intéressant et qui se lit assez facilement.
A faire lire à ceux qui envisageraient de faire du tourisme -de l’alpinisme à partir des camps de base de la Chine- au Tibet. Pendant les ascensions, la répression continue. Ce qui me choque plus que tout dans ce roman c’est la violence de cette répression qui frappe les Tibétains qui veulent préserver leur culture : la destruction des temples, la torture, l’internement dans les « fabriques à yétis » : les hôpitaux psychiatriques. Un article récent dans Courrier international du 23 au 29 février 2012 confirme que la répression continue au Tibet hors de la vue des journalistes tandis que les immolations par le feu se multiplient.
Qu’est-ce que ça raconte ? La ministre du tourisme chinois est assassinée lors d’un déplacement au Tibet. Une alpiniste américaine aussi mais son corps a disparu. Shan, le héros qui mène l’enquête, est un Chinois passé du côté des Tibétains après avoir été lui-même longtemps interné au bagne local.. Il découvre que le crime plonge ses racines plus de 30 ans auparavant, à l’époque de la révolution culturelle. Les violences d’alors ont généré traumatismes et rancunes encore violents aujourd’hui.
J’aime beaucoup les photos utilisées pour ces éditions récentes des romans de Pattison et particulièrement celle de la couverture du Seigneur de la mort.
Londres, 1896. Devenu directeur de la special branch (les renseignements généraux britanniques), Thomas Pitt est informé qu’un attentat se prépare contre un prince peu en vue de la famille Habsbourg. Confronté à sa première affaire sérieuse notre héros doit faire la preuve de ses capacités. Il sait qu’il est attendu au tournant par tous ceux qui n’ont pas accepté la nomination à ce poste du fils d’un garde chasse et qui lui font sentir à l’occasion qu’il n’est pas bien né.
Pour moi Dorchester terrace est un épisode faible des aventures de Thomas Pitt. Il passe beaucoup de temps à se poser les mêmes questions et quand il se les est posé trois fois, c’est bon, j’ai compris. Je trouve qu’Anne Perry tire un peu à la ligne. Pour finir je ne suis pas vraiment convaincue par le dénouement de l’affaire. Qu’un membre important du gouvernement britannique se rende coupable de trahison pour éviter qu’on ne sache que son père avait eu une aventure extra-conjugale 30 ans plus tôt ne me parait pas très crédible. Ceci dit j’ai quand même lu ce roman sans déplaisir.
A Istanbul un tueur en série assassine des travestis portant des prénoms de prophètes en s’inspirant de l’histoire des prophètes en question (Jonas est noyé). Le narrateur, gérant d’un club de travestis sous son identité féminine, informaticien sous son identité masculine, mène l’enquête.
Cela me fait penser à Millénium chez les Turcs, le suspense en moins. C’est sympathique et pas déplaisant à lire mais l’enquête policière offre bien peu de surprises et le roman ne me laissera sans doute pas un souvenir impérissable.
5- Au terme du voyage L’ordinaire étant assuré Les pionniers du Minnesota peuvent maintenant envisager d’accéder à des éléments de confort. Petit à petit une cuisinière à bois, une machine à coudre, une lampe à pétrole font leur apparition au foyer de Karl Oskar et Kristina, objets dont la possession semblait inimaginable quelques années auparavant et qui font mieux mesurer le chemin parcouru surtout quand, avec des immigrants de plus en plus nombreux, arrivent de Suède les nouvelles d’une famine.
En 1858 le Minnesota devient le 32° état des Etats-Unis. Devenus citoyens ses habitants peuvent maintenant participer aux élections. Mais trois ans plus tard lorsque la guerre de Sécession éclate et que l’on recrute des volontaires pour aller défendre l’Union Karl Oskar se retrouve confronté à de nouvelles responsabilités.
Cette époque est aussi celle d’une guerre beaucoup plus proche, la révolte des Sioux du Minnesota. L’hiver 1861-1862 a été particulièrement dur, encore plus pour les Indiens de la région privés de leurs territoires de chasse et qui n’ont pas obtenu les sommes promises en échange. Ils meurent de faim. A l’été 1862 ils se révoltent en massacrant les habitants des fermes isolées. Au total plus de mille colons sont tués mais ce combat, passés les premiers moments de surprise, est perdu d’avance pour les Sioux.
Devenu un vieil homme Karl Oskar constate que si ses fils comprennent encore le suédois ils ne parlent plus leur langue maternelle et ont un peu honte de leur père qui n’a jamais appris un anglais correct.
Au terme du voyage termine parfaitement l’excellente Saga des émigrants. Je trouve très intéressante l’histoire du Minnesota dans les années 1860 et la façon dont l’auteur la croise avec celle de la famille Nilsson. Et en plus tout cela est fort bien écrit.
4- Les pionniers du Minnesota Karl Oskar a installé sa famille sur La terre bénie dont il rêvait. La vie est rude pour les pionniers et le travail ne manque pas mais les efforts sont payés de retour. Chaque année Karl Oskar défriche de nouvelles terres et récolte à des rendements qu’il n’avait jamais connus. La famille s’agrandit avec la naissance de petits Américains.
Les aspirations de Kristina ne sont pas exactement celles de son mari. Mère à 30 ans de six enfants sans compter les deux morts en bas âge, elle a le sentiment d’avoir perdu sa jeunesse et garde la nostalgie du « pays » où elle retourne la nuit en rêve. Elle ne s’est pas mise à l’anglais alors que tout son entourage parle un suédois de moins en moins pur. Aussi elle accueille avec plaisir l’arrivée de nouveaux immigrants de même origine qu’eux. Bientôt une petite communauté suédoise se développe autour du lac Ki-Chi-Saga, on envisage de construire une église et d’embaucher un pasteur et un maître d’école.
Robert, parti pour la ruée vers l’or en Californie, revient après quatre ans sans donner de nouvelles. Il est malade et déprimé et ne parle guère de ce qu’il a vécu pendant son absence.
J’apprécie toujours autant La saga des émigrants. Que ce soit l’assurance de Karl Oskar ou les doutes de Kristina, les sentiments des personnages sont toujours bien décrits et je me sens proche d’eux.
3- La terre bénie Après une longue et pénible traversée nos émigrants posent le pied avec soulagement sur le sol américain. Leur voyage n’est pas terminé pour autant car Karl Oskar a décidé de s’installer dans le Minnesota. Aves sa famille il est suivi par 16 personnes qui ont fait de lui leur chef. Le trajet se poursuit en train -une première pour ces Suédois- puis encore en bateau sur les affluents du Mississippi. Après de nouvelles épreuves voici enfin le Minnesota, territoire « presque aussi grand que la Suède » où on ne « comptait guère plus d’une centaine de colons s’étant lancés dans l’agriculture ».
C’est le début de l’automne et il est trop tard pour semer, tout juste temps pour construire une maison capable d’affronter l’hiver. Karl Oskar décide d’installer sa famille sur les bords du lac Ki-Chi-Saga où la terre est fertile et où seuls des Indiens sont jamais passés. Ce voisinage inquiète la famille qui a aussi un peu pitié de ces pauvres païens : « Robert n’ignorait pas que les Indiens tiraient sur les gens avec des flèches empoisonnées, enfonçaient des pointes de bois émoussées dans leur corps et leur découpaient le cuir chevelu avec des couteaux à peine tranchants. (…) On ne pouvait s’attendre à rien d’autre de personnes qui n’avaient reçu ni le baptême ni la communion. (…) Mais ils ne manqueraient pas de mettre un terme à ces pratiques barbares dès qu’ils seraient civilisés et christianisés. Sitôt que des missionnaires seraient venus parmi eux (…) ils tueraient leurs ennemis avec des fusils à cartouches et les scalperaient avec des couteaux de chasse. »
Les débuts sont durs. Il faut beaucoup travailler, tout reconstruire de zéro. Robert, le jeune frère de Karl Oskar, est déçu. Il pensait qu’en Amérique il n’aurait plus de maître mais le voilà à faire le valet de son frère. Il décide de quitter la famille, de partir vers la Californie et la ruée vers l’or où il espère s’enrichir facilement.
Karl Oskar ne craint pas le travail et apprécie la liberté dont il jouit dans son nouveau pays. Ici les anciennes classes sociales n’existent plus, on appelle les paysans « mister » et aucun pasteur ne vient à domicile vous dire comment vous comporter. Tout est possible à l’homme entreprenant et la Suède apparait comme un vieux pays figé dans ses traditions. Je trouve très intéressant de voir comment s’est construite cette Amérique pionnière, à la fois en réaction à une Europe sclérosée et en luttant contre une nature pas toujours amicale (hivers très froids, tempêtes de neige). Ca me permet de mieux comprendre les bases du libéralisme actuel.
Par moments la vie des pionniers me fait penser à La petite maison dans la prairie dont justement l’action se déroule dans le Minnesota.
A l’heure où j’écris ces lignes j’ai déjà lu le tome 4 et commencé le 5. En ce moment je lis plus vite que je n’écris.
2- La traversée Dans Au pays, un groupe de paysans décidait, pour diverses raisons, de quitter la Suède pour les Etats-Unis. La traversée raconte leur long voyage à bord de la Charlotta. Tous n’arriveront pas au but. La maladie frappe les passagers aux conditions de vie précaires. Les morts sont jetés à la mer avec trois pelletées de terre de Suède dont le capitaine, homme prévoyant, à emporté un boisseau à bord.
Désoeuvrés pendant des semaines, ce qui ne leur était jamais arrivé à la ferme, les émigrants ont tout le temps de reconsidérer leur choix et d’envisager tout ce qu’il implique. C’est en croisant un navire suédois en sens inverse qu’ils prennent conscience qu’eux-mêmes ne verront plus jamais le « pays ». Chacun transporte avec lui ses rêves. Karl-Oskar espère atteindre ces grandes plaines où le blé pousse dru sur des champs qui s’étendent à perte de vue. Danjel, le nouveau prophète, est convaincu que l’esprit saint descendra sur lui et ses disciples et qu’ils comprendront la langue de leur nouveau pays aussitôt qu’ils y auront posé le pied.
Vilhelm Moberg traite avec beaucoup d’affection ses personnages, gens simples dont la psychologie est finement étudiée. C’est avec impatience qu’ils accostent enfin à Manhattan et moi aussi je suis impatiente de découvrir quel sera leur contact avec la réalité américaine. Je repose le tome 2 pour ouvrir le 3.