L’auteur est le fils d’un paysan communiste du Limousin. Son enfance a été bercée du mythe de l’URSS, paradis des ouvriers et des paysans. En 1991, à l’occasion d’un séjour en Russie il loue une chambre chez Tamara qui lui raconte son enfance difficile au pays des soviets, la famille de cinq personnes logée dans une seule pièce. Claude Duneton découvre alors que les lendemains qui chantent n’étaient qu’une illusion. Cette découverte peut se comparer à ce que serait pour un croyant celle de la preuve que Dieu n’existe pas. Il éprouve un sentiment de trahison. Ceux qui savaient et qui ont menti au peuple sont pointés et en prennent pour leur grade : Maurice Thorez et surtout Jean-Paul Sartre.
Un petit livre écrit dans un Français coloré d’expressions populaires, un style auquel je n’acroche pas vraiment. C’est facile à lire, ça a du faire du bien à Claude Duneton de l’écrire mais je trouve que ça n’apporte rien de nouveau au sujet. Je n’ai pas attendu 1991 pour savoir que l’URSS de Staline était un Etat totalitaire.
Paul Auster, La nuit de l’oracle, Actes sud
Le narrateur, l’écrivain Sidney Orr, a été très gravement malade et sort juste de l’hôpital où il a fait un long séjour. Pendant sa convalescence il découvre dans son quartier une petite papeterie où il achète un carnet bleu fabriqué au Portugal. Rentré chez lui, il se met à écrire dans le carnet les bases d’un nouveau roman. Il est dans un état second et les mots arrivent sans qu’il ait besoin de les chercher.
L’histoire qui surgit presque d’elle même est celle de Nick Bowen, un éditeur new-yorkais. Alors qu’il effectue une course dans son quartier un morceau de corniche d’un immeuble se détache et s’écrase juste à côté de lui, l’épargnant de peu. Cet accident entraîne Bowen à s’interroger sur le sens de sa vie, son mariage qui bat de l’aile, sa rencontre peu de temps auparavant avec une jeune femme, Rosa Leightman, pour qui il a ressenti une grande attirance.
Interprétant le fait qu’il n’a pas été tué comme un signe, Bowen décide de recommencer sa vie. Il disparaît volontairement, prend le premier avion qui quitte New-York. Il emporte avec lui un manuscrit écrit par Sylvia Maxwell, la grand-mère de Rosa Leightman.
Ce manuscrit s’intitule « La nuit de l’oracle » et raconte l’histoire d’un aveugle, mutilé de la première guerre mondiale, qui fait des rêves prémonitoires.
L’histoire de Sidney Orr et celle de Nick Bowen s’entrecroisent dans ce roman plein d’invention et de rebondissements. Sidney Orr à un moment ne sait plus très bien s’il est dans sa vie ou dans celle de son personnage et moi-même j’étais dans une situation identique, ne sachant plus dans quel récit je me trouvais. En plus des deux récits principaux, d’autres viennent s’ajouter, plus ou moins esquissés : celui du manuscrit qui donne son titre au roman, ceux des personnages secondaires. L’un de ces personnages secondaires, Jacob Trause, a de nombreux points communs avec Mark de Tout ce que j’aimais (Siri Hustvedt). L’un a manifestement inspiré l’autre, à moins que les deux aient été inspirés par la même personne. Siri Hustvedt est la femme de Paul Auster.
La question de fond est celle du lien entre la fiction et la réalité. Un écrivain décrit des évènements qui se réalisent peu de temps après. le fait d’avoir pensé et écrit les choses les a-t-il amené à se produire ou l’auteur a-t-il prédit l’avenir ? « Nous savons parfois les choses avant qu’elles ne se produisent, même si nous ne savons pas que nous savons » répond Sidney Orr.
Hugo Hamilton, Sang impur, Phébus
Dans cet excellent roman autobiographique Hugo Hamilton raconte son enfance en Irlande, à Dublin, dans les années 50 et 60. Une enfance partagée entre trois langues et trois cultures.
Celles de sa mère, une Allemande issue d’une famille antinazie. Venue en Irlande pour un pèlerinage après la guerre, elle y a rencontré son mari. C’est une femme chaleureuse qui confectionne de nombreux gâteaux, une femme dont sa jeunesse dans l’Allemagne nazie a fait une non-violente qui pense que les conflits doivent se régler par la parole et non par le poing.
Celles de son père, nationaliste irlandais qui interdit à ses enfants de parler Anglais et qui a renié son père, marin dans la marine britannique qui ne parlait pas un mot d’Irlandais. C’est un homme qui parle du pouvoir de la parole pour convaincre les Irlandais de parler leur propre langue et qui n’hésite pas à utiliser le poing quand ses enfants profèrent un mot de la langue des colonisateurs.
Celles de la rue où l’on parle majoritairement Anglais. Où les autres enfants se moquent des petits Hamilton qui ne sont pas comme eux, que l’on traite de nazis parcequ’à moitié Allemands.
Mais cette Irlande où l’on tape sur des enfants accusés des crimes du nazisme c’est aussi celle où la mère peut s’entendre dire : « Bien joué les Allemands, pour la sacrée belle raclée que vous avez flanquée aux British ! Bien joué pour ça au moins, Hitler ! »
Hugo a du mal à se situer au milieu de tout cela. Il est conscient de sa différence et aimerait parfois être un enfant comme les autres cependant il s’aperçoit qu’il n’arrive pas à renier les valeurs qui lui ont été inculquées.
Le livre est très bien écrit dans un style d’une apparente simplicité qui restitue les sensations de l’enfance, mêlant réalité et imagination. Le jeune Hamilton apparaît comme un garçon intelligent et attachant.
Des extraits de l’oeuvre :
« Comme ça, on a eu un ami pour la vie. On a appris à nager et à plonger et, pendant tout l’été, on est allé à la piscine municipale tous les jours. On a économisé et on s’est acheté des lunettes de plongée pour pouvoir aller sous l’eau et faire des concours pour repêcher des pennies au fond de la piscine. On jetait la pièce au fond du grand bassin et on la regardait tourner pendant qu’elle s’enfonçait dans l’eau et qu’elle disparaissait. Après, on plongeait pour la chercher sous l’eau et là il n’y avait pas de langue, juste des bulles qui bourdonnaient tout autour de nous. On se chronométrait chacun son tour pour voir qui pouvait tenir sous l’eau le plus longtemps et je gagnais presque toujours parce que je pouvais rester là jusqu’à ce que mes poumons éclatent presque,quand je risquais de mourir et que j’étais obligé de remonter pour retrouver des mots. J’étais champion du pas-respirer. Des fois, on descendait tous les trois ensemble et on se serrait la main. On avait l’impression qu’on pourrait vivre là en bas, juste assis au fond de la piscine à se faire des signes. Quand on ressortait de l’eau, on avait les genoux violets, les mains violettes, les lèvres violettes. Et on claquait des dents. Et puis, c’était l’heure de rentrer à la maison et on s’achetait du chewing-gum. Noel trouvait qu’il avait encore de l’eau dans une oreille et il devait se pencher d’un côté pour la laisser se vider, comme une cruche. On était amis pour la vie et on rentrait à la maison avec nos serviettes autour du cou, on tapait nos maillots de bain sur les murs et ils laissaient des traces, comme des signatures sur tout le chemin. On attendait d’arriver au dernier réverbère avant d’arrêter de parler anglais. »
« Mrs Robinson a écarté ses voilages et regardé vers moi, de l’autre côté de la rue, je lui ai fait signe mais elle ne m’a pas vu à travers le brouillard. Des fois, elle nous laisse regarder la télévision chez elle et je connais l’odeur de sa maison. Ca sent différemment dans chaque maison : avec certaines odeurs, on se sent tout seul ; avec d’autres, on se sent chez soi. La maison de Miss Tarleton, elle a une odeur de serre et de chou bouilli ; chez Miss Hosford, ça sent comme chez le pharmacien. La maison de Miss McSweeney sent le caramel et le cirage. L’appartement de Miss Doyle, à l’étage, sent toujours les beans on toast. Chez Miss Ryan, ça sent la lessive et le repassage, avec aussi une petite odeur de réglisse ; et chez Miss Brown, on dirait un mélange de savon, de fumée de cigarette et de l’odeur qu’il y a derrière un poste de radio qui marche depuis un moment. Je ne sais pas ce qui rend l’odeur de chaque maison si différente mais chez nous, ça sent comme être heureux et avoir peur. Chez notre ami Noel, ça sent comme quand personne ne se met jamais en colère, parce que son père est médecin, que sa mère ne crie jamais et qu’ils ont un chien. La maison de Tante Roseleen sent la limonade rouge, et chez Onkel Ted ça sent comme dans un autre pays, comme dans la maison à la porte jaune et à la crème anglaise, là où on se languit toujours d’être chez soi. »
Anne Perry, Meurtres souterrains, 10-18
La 15° aventure de William Monk.
William Monk a repris du service dans la police, il dirige une brigade fluviale. Un soir, alors qu’il patrouille sur la Tamise avec ses hommes, ils assistent à un drame qui se trame sur un pont sous lequel ils s’apprètent à passer. Un jeune couple bascule par dessus la rambarde, elle (Mary Havilland) d’abord, lui (Toby Argyll) à sa suite et tombe à l’eau, se noyant immédiatement. Que s’est-il passé ? A-t-elle voulu se suicider et lui la retenir ? Ou a-t-il cherché à la pousser et l’a-t-elle entraîné dans sa chute ? La famille des victimes opte pour la première explication : le père de la jeune fille s’était suicidé quelques temps auparavant et elle n’aurait pas supporté cette perte cruelle.
Cependant Monk va découvrir que les choses sont plus compliquées qu’il n’y paraît. Et si on avait voulu faire taire le père puis la fille ? C’est l’époque où des entreprises se livrent une concurrence acharnée pour creuser un réseau moderne d’égouts à Londres et M. Havilland, ingénieur de la compagnie dirigée par le frère de Toby Argyll craignait une catastrophe qui coûterait la vie à de nombreux ouvriers.
Pour mener l’enquête Monk s’associe avec son second, Orme et avec le commissaire Runcorn, son ancien chef et ennemi. Ils descendent dans le Londres souterrain, formé d’antiques canalisations, rivières, catacombes et peuplé de toute une faune de boueux, chiffe-tire, voleurs et miséreux.
On fait connaissance avec ce monde pittoresque mais j’ai trouvé l’intrigue policière peu convaincante. Je n’ai guère adhéré à la machination dont on découvre en fin d’histoire une partie des motivations tandis que les autres restent un mystère pour les personnages et le lecteur.
C’est toujours très lisible mais à mon avis Anne Perry fait ici un peu du sur place. Ses ouvrages précédents ont montré qu’elle est très capable de relancer un intérêt faiblissant donc j’attends encore la suite avec impatience.
Anita Nair, Compartiment pour dames, Picquier
Le père d’Akhila est mort quand elle avait 19 ans. Fille aînée elle a du travailler pour subvenir aux besoins de sa famille. Elle a sacrifié sa jeunesse pour les siens et tout le monde a trouvé cela normal. Le temps a passé. Ses frères et sa soeur se sont mariés et Akhila est restée célibataire. Sa mère est morte à son tour mais Akhila est restée akka, la soeur aînée dévouée dont la personnalité s’est effacée derrière ce rôle. Aucun de ses proches n’imagine qu’elle puisse avoir des désirs propres et elle-même semble l’avoir presque oublié.
Cependant, à 45 ans, Akhila commence à se lasser de cette place que les circonstances lui ont assignée et se pose des questions sur son avenir : va-t-elle continuer à nier ce qu’elle ressent ou va-t-elle enfin exister pour elle-même ? Elle a besoin de temps pour y réfléchir et décide de partir en voyage. Elle prend un billet de train pour Kanyakumari, à l’extrémité sud de l’Inde, là où trois mers se rencontrent. L’océan indien, la baie du Bengale et la mer d’Arabie. Elle réserve une couchette dans un compartiment pour dames.
Elle se retrouve là avec cinq autres femmes avec qui elle va passer la nuit et à qui elle pose la question qui la taraude : une femme peut-elle vivre sans homme ?
Pour répondre à la question, chacune de ces femmes va raconter sa propre histoire. Akhila puisera dans ces itinéraires la force de faire un choix personnel.
Il y a Janaki, une dame d’un certain âge que son mari a toujours entourée et traitée comme si elle était incapable de se débrouiller seule. Elle l’a d’abord accepté comme quelque chose de normal, puis cela lui est devenu insuportable, enfin elle s’est aperçue qu’elle aimait son mari.
Il y a Sheela, 14 ans, qui a accompli le dernier voeux de sa grand-mère mourante, malgré la désaprobation de sa famille.
Il y a Margaret qui a trouvé comment neutraliser son mari, directeur d’école autoritariste qui traumatisait ses élèves avec ses punitions sadiques.
Il y a Prabha Devi. Epouse parfaite et mère modèle elle a oublié qu’elle était aussi une femme. A 40 ans elle décide de s’accorder un peu de temps et d’apprendre à nager.
Enfin il y a Marikolanthu. Mère célibataire à la suite d’un viol il lui a fallu de nombreuses années avant de surmonter son traumatisme et d’accepter son fils.
Un bien bon roman. Il est écrit dans un style simple et plein d’heureuses trouvailles. Les récits de ses compagnes font revenir à la mémoire d’Akhila des épisodes de sa propre vie et la narration alterne histoires des unes et souvenirs de l’autre. Bien sur les vies de ces femmes sont influencées par le poids de la société traditionnelle indienne mais leurs aspirations sont universelles. Ce roman nous invite à nous pencher sur une question qui concerne chacun d’entre nous : comment être maître de son destin ?
Paul Auster, Le livre des illusions, Babel
La femme et les deux jeunes enfants du narrateur, David Zimmer, sont morts dans un accident d’avion. Après cette catastrophe, David traverse une période de profonde dépression. Un jour, en regardant un documentaire à la télévision, il découvre l’existence d’Hector Mann. Hector Mann était un acteur comique de l’époque du cinéma muet. Il a eu un certain succès avant de disparaître en 1929 : il est parti de chez lui, abandonnant toutes ses affaires et personne n’a plus jamais entendu parler de lui. Un extrait d’un film d’Hector Mann fait rire David Zimmer et c’est la première fois qu’il rit depuis des mois.
Dans un sursaut vital pour échapper au désespoir il décide d’écrire un livre consacré à l’oeuvre d’Hector Mann. Après la parution du livre David Zimmer reçoit une lettre d’une femme qui se prétend l’épouse d’Hector Mann. Celui-ci serait encore vivant, 60 ans après sa disparition, et souhaiterait rencontrer Zimmer. David croit d’abord à un canular et temporise mais un soir une jeune femme se présente à sa porte : elle est envoyée par l’épouse d’Hector Mann pour le convaincre de se rendre au chevet de ce dernier.
Voilà un très bon Paul Auster que j’ai lu d’une seule traite. Comme toujours c’est bien écrit et les personnages ont des vies hors du commun avec de nombreux rebondissements. Les détails sont tellement précis que je me suis demandé un moment si Hector Mann n’avait pas existé pour de vrai.
On retrouve dans le livre des illusions des thèmes chers à Paul Auster : un personnage disparaît et tout le monde le croit mort (comme dans Leviathan ou dans Moon Palace). Un artiste crée des oeuvres que personne ne verra jamais (comme dans Moon Palace).
Il est aussi question de responsabilité et de comment expier ce dont on est coupable.
Samina Ali, Jours de pluie à Madras, Mercure de France
La narratrice, Layla, est une Indienne musulmane de 19 ans. Ses parents ont émigré aux Etats-Unis quand elle était petite et depuis elle a vécu entre ce pays et l’Inde, six mois ici et six mois là-bas. Ce perpétuel déracinement lui a été imposé par son père par crainte qu’elle n’oublie ses traditions et qu’elle ne s’occidentalise trop. La surveillance constante dont elle a été l’objet depuis sa puberté n’a pas empêché qu’elle aie une relation sexuelle avec Nate et cela juste avant de repartir une nouvelle fois en Inde où elle doit épouser Samir, choisi par sa famille.
Pour Layla, ce mariage est l’occasion de quitter un père qui la bat et une mère pour qui elle est une charge malfaisante, peut-être de connaître enfin l’affection en famille. Cependant elle craint la réaction de Samir quand il découvrira qu’il n’est pas le premier. La chassera-t-il comme il en a le droit ou pourront-ils s’entendre ? Les choses se compliquent au-delà de ce que Layla pouvait imaginer car Samir cache lui aussi un difficile secret.
Après le mariage, le jeune couple habite dans la famille de Samir. Dans cette maison de trois pièces où vivent six adultes (Ibrahim et Zeba, les parents de Samir; Samir et Layla; Feroz, le frère de Samir et Nafiza, la nourrice de Layla venue comme domestique) les jeunes mariés ont peu d’intimité bien que Ibrahim et Zeba leur aient abandonné leur chambre. Difficile de faire connaissance quand en plus la religion s’en mèle : il faut se lever tôt pour la première prière de la journée, il faut respecter des jours d’abstinence. A cette occasion Zeba, très pratiquante, impose à Layla de dormir avec elle tandis que Samir dort avec son père.
On comprend que Samir soit impatient d’émigrer vers les Etats-Unis où il espère pouvoir vivre plus librement. Mais avant que ce projet ne se réalise, la violence contenue surgit dans une agression meurtrière de fanatiques hindous contre la communauté musulmane. Samir et Layla, chacun de leur côté, vont devoir affronter leur destin.
C’est bien écrit, le style retranscrit bien l’ambiance en apparence nonchalante de la vie de recluses des femmes de cette communauté et la violence sous-jacente. On comprend l’enfermement qui pèse sur tous, le poids d’une religion et d’une existence vécues sous l’oeil des voisins et qui n’offrent que fort peu de place pour les libertés individuelles.
Siri Hustvedt, Tout ce que j’aimais, Babel
Léo, le narrateur, un homme vieillissant, se penche sur son passé et égrène ses souvenirs depuis l’époque de son mariage. Léo et Erica, sa femme, vivent à New-York et sont tous les deux professeurs d’université. Léo se lie d’amitié avec Bill, un artiste peintre. Bill est marié à Lucille, puis ils divorcent et Bill épouse Violet. Après ce deuxième mariage, les deux couples deviennent très proches. Ils habitent dans le même immeuble, déjeunent régulièrement les uns chez les autres, passent leurs vacances ensemble. Comme Léo et Bill, Erica et Violet sont très proches l’une de l’autre.
Toute la première partie est empreinte d’une nostalgie douce, de l’amitié vraie, de l’heureux temps passé.
Mais le malheur va frapper durement ces deux familles et les événements prennent petit à petit une tournure inquiétante.
Dans ce livre, comme dans le précédent que j’ai lu (La fille qui marchait sur l’eau) il est question de la mort d’un enfant et de ses parents qui s’éloignent l’un de l’autre après cette tragédie, incapables de continuer à vivre ensemble mais incapables aussi de se séparer complètement. Mais il est question aussi d’une situation même plus difficile pour des parents que la mort d’un enfant.
L’action s’accélère et s’éloigne de la tranquillité du début pour atteindre à une forme d’angoisse. La note positive c’est que l’amitié survit aux coups du destin et est une aide pour les encaisser.
J’ai beaucoup aimé ce livre. Il est bien écrit et de plus en plus prenant à mesure qu’on avance dans sa lecture. Siri Hustvedt est la femme de Paul Auster et par sa qualité d’écriture, par le fait que l’action se situe dans le même milieu intellectuel new-yorkais, ce livre m’a parfois fait penser à du Paul Auster. J’ai l’intention de me procurer d’autres livres de cet Siri Hustvedt.
Siddarth Dhanvant Shanghvi, La fille qui marchait sur l’eau, 10-18
L’histoire se passe à Bombay, dans l’Inde britannique du début du 20° siècle.
Au début de leur mariage, Anuradha et Vardhmaan Gandharva ont connu quelques années d’amour intense. Amants et amis, ils ont partagé des moments précieux. Mais la mort accidentelle de leur fils Mohan dresse entre eux un mur d’incompréhension. Alors qu’ Anuradha surmonte sa douleur grâce à une chanson, Vadhmaan reste traumatisé et s’éloigne petit à petit de sa femme.
Le livre raconte aussi l’histoire de personnages secondaires intéressants. Ainsi Nandini Hariharan, femme extravagante et provocatrice. Elle choque et fascine le tout-Bombay par son comportement violent qui n’est en fait pour elle qu’une façon d’essayer d’oublier son enfance douloureuse.
C’est un livre qui parle d’amour. Amour éternel, amour qui est le but de la vie, amour qui peut tuer celui qui n’arrive pas à le donner.
C’est un livre dans lequel les élèments et les choses ont une vie propre. Une chanson est si belle qu’elle peut faire s’allumer toutes les lumières d’une maison. Une maison protège le souvenir de son premier occupant en jetant ses maléfices à tous ceux qui essaient de s’y installer ensuite. Un son est tellement âpre qu’il altère la texture de la peau des humains.
C’est un livre prenant. La fin est poignante (j’ai pleuré).
Boris Akounine, Altyn Tolobas, 10-18
Nicholas Fandorine est un historien britannique d’origine russe (sa grand-mère a fuit la Russie en 1920). A la fin des années 90 il met pour la première fois le pied sur la terre de ses ancêtres. Il vient pour entreprendre des recherches sur Cornelius Von Dorn, le fondateur de la lignée des Fandorine en Russie au 17° siècle. Il est muni d’un demi-parchemin hérité de Cornelius et compte consulter aux archives à Moscou l’autre moitié de ce document. Cette tâche en apparence facile ne sera pas de tout repos. Vol de ses affaires, poursuites, tentatives d’assassinat : il semble que les mafias russes s’interressent aux recherches de Fandorine.
Notre héros traverse tout cela en Candide que sa fraîcheur sauve de bien des situations périlleuses.
Boris Akounine alterne un chapitre des aventures de Nicholas Fandorine et un chapitre de celles de son ancêtre Cornelius Von Dorn. Ainsi on apprend comment s’organisait la vie autour du tsar à la fin du 17° siècle, on découvre les manoeuvres de palais.
L’ouvrage est très bien documenté et on retrouve toujours cet humour fin et jubilatoire qui caractérise l’auteur. Un régal.