Ma yan est une écolière chinoise de 13 ans. Elle est la fille aînée d’une famille de trois enfants. Ses parents sont de pauvres paysans du Ningxia, région du nord ouest de la Chine.
Pierre Haski est le correspondant de Libération en Chine. Alors qu’il traverse le village où habite la famille Ma, la mère de Ma Yan lui remet le journal de sa fille.
Dans son journal, Ma Yan raconte sa vie quotidienne à l’école. Elle est interne à 20 km de chez elle et fait les trajets à pied. Elle ne mange pas à sa faim mais veut réussir ses études pour avoir une vie meilleure que ses parents et pouvoir les honorer. La mère de Ma Yan met aussi beaucoup d’espoirs dans la réussite scolaire de sa fille.
Grâce à ce livre très intéressant on découvre les conditions de vie très dures des pauvres paysans de l’intérieur de la Chine. J’ai été frappée par l’extrême dénuement : une partie du journal de Ma Yan a disparu en fumée, utilisé comme papier à cigarettes par son père. On découvre aussi le mode de pensée d’une jeune fille chinoise : l’importance du respect du aux aînés et aux maîtres. Dans cette édition, le journal est complété de commentaires et d’explications de Pierre Haski sur la vie en Chine.
Pierre Haski et les lecteurs du Journal ont été touchés par le courage de Ma Yan. La parution du livre a permis à d’autres écoliers du village de Ma Yan d’avoir leurs études financées.
Dans cet ouvrage très complet, on trouve une chronologie du goulag, des premiers camps des îles Solovetski à la chûte de l’URSS : rationalisation du fonctionnement des camps, gigantomanie des années 30 avec le creusement du canal de la mer Blanche, expansion vers l’est, années difficiles de la seconde guerre mondiale, mort de Staline, époque des dissidents.
Une partie est consacrée aux conditions de vie dans les camps – depuis l’arrivée, en passant par le travail, les châtiments et les récompenses, les stratégies de survie, les tentatives d’évasion et la rébellion.
L’ensemble se veut un ouvrage de vulgarisation et la lecture est facilitée par la présence de nombreux témoignages. Après avoir déjà lu plusieurs autres ouvrages sur le goulag, j’ai encore appris des choses sur le sujet.
Encore plus de lectures sur le sujet :
Sous la direction de Stéphane Courtois, Le livre noir du communisme, R. Laffont, 1997.
Tous les crimes du communisme sont abordés ici, pas seulement le goulag auquel une cinquantaine de pages sont consacrées. On fera aussi connaissance avec les camps d’Europe de l’est, le laogaï (goulag chinois) et autres camps asiatiques, les camps d’Amérique du sud.
Selon les auteurs, la lecture est plus ou moins abordable mais toujours intéressante et instructive.
Joël Kotek et Pierre Rigoulot, Le siècle des camps, Lattès, 2000.
Ici, c’est tous les camps du 20° siècle qui sont étudiés, qu’ils soient de droite, de gauche ou coloniaux. Un chapitre est consacré au goulag. Encore un ouvrage fort instructif.
Ces deux études plus générales permettent aussi la comparaison. On trouve de nombreux points communs entre ces camps de toutes origines. Une lecture à éviter si vous êtes dans une période de découragement par rapport à la nature humaine.
L’expérience du goulag a aussi produit de nombreux récits autobiographiques et témoignages. Une façon d’aborder le sujet de manière plus vivante et plus personnelle.
Margarete Buber-Neumann, Déportée en Sibérie, Points. Suivi de : Déportée à Ravensbrück.
Margarete Buber-Neumann (1901-1989) était la femme de Hans Neumann, cadre du parti communiste allemand dans les années 30. Après l’arrivée au pouvoir d’Hitler, les Neumann se réfugient en URSS. Au moment des grandes purges de 1937 ils sont arrêtés. Hans Neumann disparaît. On suppose qu’il est mort peu après son arrestation. Margarete est envoyée au goulag, ce qu’elle raconte dans Déportée en Sibérie. Après le pacte germano-soviétique (1939) Staline livre à Hitler les communistes allemands qu’il détenait. Margarete est alors Déportée à Ravensbrück.
A travers ces deux ouvrages qui permettent une comparaison des deux systèmes concentrationnaires, on découvre une femme d’une grande valeur morale, qui est toujours restée fidèle à ses convictions et qui ne s’est pas compromise, même dans les pires moments.
Jacques Rossi, Qu’elle était belle cette utopie ! chroniques du goulag, Le Cherche midi. Jacques Rossi et Michèle Sarde, Jacques le Français, Pocket.
Jacques Rossi (1909-2004) a adhéré très jeune au parti communiste et est devenu agent de renseignements du komintern. En 1937 il est arrêté et condamné au goulag. Il comprend bientôt que « le goulag n’est pas une perversion du système mais le système lui-même ».
Dans cette histoire de sa vie (Jacques le Français) la période de la détention tient la plus grande place. mais Jacques plaide coupable : il a été un rouage du système, il accepte que le système se débarrasse de lui. Ici aussi on découvre une personnalité de valeur qui a su reconnaître ses erreurs et évoluer positivement à travers des situations extrêmement difficiles.
Varlam Chalamov, Récits de la Kolima.
Ecrivain et poéte soviétique, Chalamov (1907-1982) a passé de nombreuses années au goulag. De cette expérience il tire les récits relativement courts de Kolima.
Son propos est de montrer qu’au goulag c’est chacun pour soi, qu’aucune solidarité ne joue dans des conditions de survie aussi rudes. Cependant les récits démentent régulièrement une telle thèse. En effet, on fait connaissance encore une fois avec une grande conscience morale. Au travers des épreuves, Chalamov a gardé toute son humanité.
Donc, si vous voulez trouver matière à espérer dans l’espèce humaine, c’est plutôt ces souvenirs qu’il vous faudra lire que des études historiques. En effet, chacun de ces trois témoins m’a impressionnée par les qualités morales dont il a fait montre à travers l’épreuve.
Le dernier sorti d’une excellente série de romans policiers historiques et psychologiques.
Historiques car l’action se situe à la fin du 19° siècle (à partir de 1880) dans l’Angleterre victorienne. Avec le commissaire Thomas Pitt et son épouse Charlotte on pénètre dans l’intimité de la haute société, si respectable en apparence mais qu’on découvre rongée par les turpitudes.
Psychologiques car entre la découverte du crime et sa résolution il y a peu d’action mais beaucoup de questions. Que cachent les suspects ? L’auteur excelle à faire émerger les faiblesses et les mesquineries de ces gens qui se croient supérieurs. Anne Perry connaît et décrit parfaitement la nature humaine. Son analyse est toujours d’actualité et nous amène à nous interroger sur nos propres insuffisances. Le tout n’est pas dénué d’humour fin et jubilatoire.
Voilà pour moi la combinaison idéale du roman : on s’instruit, on s’amuse et on en apprend sur soi-même.
Si vous ne connaissez pas encore, quelle chance vous avez car Brunswick Gardens est le 18° roman de la série et l’intérêt ne faiblit pas. Dans cet épisode, la jeune assistante d’un éminent pasteur s’est tuée en chutant dans un escalier. Qui l’a poussée ? Tout semble accuser le pasteur. Quand on découvre que la victime était enceinte les autres hommes de la maison sont aussi suspectés. Malgré les pressions politiques et religieuses pour étouffer l’affaire nos héros feront triompher la vérité.
Anne Perry est également l’auteur d’une autre série : les enquêtes de William Monk et d’Esther Latterly qui comprend actuellement 14 romans, également chez 10-18. Cette série se déroule un peu plus tôt que la précédente (à partir de 1850). En plus des éléments qui font le succès des aventures de Charlotte et Thomas elle explore d’autres thèmes. Esther Latterly est infirmière, ce qui l’amène à travailler aussi bien au contact de la haute société que des plus démunis dont on découvre les conditions de vie sordides dans les bas fonds de Londres. William Monk a été victime au premier épisode d’un accident qui l’a laissé amnésique. Ses souvenirs reviennent très lentement. C’est l’occasion pour l’auteur de s’interroger sur la mémoire et l’identité.
D’autres lectures autour du même sujet :
Michel Faber, La rose pourpre et le lys, éditions de l’Olivier. Ne vous laissez pas impressionner par ce pavé de plus de 1100 pages car il se lit… comme un roman. Londres, 1875. La prostituée Sugar va utiliser l’intérêt qu’a pour elle le riche William Rackham pour s’élever et donner un nouveau départ à sa vie.
Michel Faber nous emmène dans les quartiers mal-famés de Londres où les filles sont prostituées dès leur plus jeune âge. Il nous introduit dans les belles demeures de la haute bourgeoisie où les femmes sont élevées dans la négation du sexe et où la nuit de noce s’apparente à un viol. On est atterré de découvrir l’hypocrisie de cette société où les vices sont tolérés du moment qu’ils sont cachés. Un bon livre.
Patricia Cornwell, Jack l’éventreur, affaire classée, Le livre de poche.
Patricia Cornwell a mené l’enquête et prouve qui était Jack l’éventreur. Une démonstration convaincante. l’auteur s’appuie sur les traces laissées par l’assassin et y ajoute un travail de « profiler » contemporain : elle se coule dans le personnage et comprend comment il fonctionne. En plus de découvrir la vie misérable des prostituées londoniennes à la fin du 19° siècle on apprend comment travaille Patricia Cornwell. C’est une véritable enquêtrice scientifique qui se documente directement auprès des services de police et des équipes médico-légales. J’imagine que ce livre devrait intéresser aussi ceux qui apprécient ses romans policiers (que je n’ai pas lus encore).
Et enfin un film : Gosford Park de Robert Altman avec Derek Jacobi, Jeremy Northam, Maggie Smith, Kristin Scott-Thomas, Clive Owen…
Un week-end mondain à la campagne dans une grande maison noble. Le maître des lieux est assassiné…deux fois ! Et en effet, plusieurs personnes semblent avoir des raisons de lui en vouloir. Qui a fait le coup ? Bien que le film se déroule dans les années 1930 rien ne semble avoir changé depuis 50 ans dans le mode de vie de la haute société britannique. Le film montre deux mondes qui se côtoient : celui des maîtres et celui des domestiques (et comme dans les ouvrages précédents on est surpris de découvrir combien il en fallait pour servir ce beau monde). C’est très bien fait. Après avoir vu le film j’ai lu Asworth Hall de Anne Perry (éditions 10-18) et il m’a paru évident que le livre avait inspiré le film (le livre est antérieur au film).