C’est l’histoire de la famille Procter dans les années 70, au moment où leurs enfants adolescents commencent à vouloir prendre leur indépendance. Seulement les Procter sont une famille qui a une histoire douloureuse. Les grands-parents ont traversé les persécutions antisémites des nazis et tous ne sont pas revenus. Les parents sont des survivants et leurs enfants portent cet héritage difficile.
Les parents de Liesel, la mère, ont fui l’Allemagne pour le Kenya avec leur fille dès les années 30. Après la guerre, ils se sont installés à Londres. C’est là que la jeune fille a rencontré son mari, Emil, envoyé en Angleterre par ses parents qui eux n’ont pas survécu à la déportation. Juifs libéraux mais attachés à leurs origines, Liesel et Emil ont deux enfants, Rose et David.
Le départ des enfants est toujours un moment difficile dans une famille unie. L’auteur nous montre qu’il l’est encore plus quand cette famille a connu des séparations définitives. Le talent de Stefanie Zweig est d’avoir dépeint tout en finesse les sentiments de ces parents aimants. On est dans l’introspection qui pousse à s’interroger sur ses propres pratiques.
Claude Izner, Le talisman de la Villette, 10-18
Ce volume est le sixième épisode des enquêtes de Victor Legris, libraire parisien de la fin du 19° siècle.
1894, en Bretagne. Corentin Jourdan, marin retiré après un accident du travail qui l’a laissé boiteux, sauve de la noyade une jeune femme dont le bateau avait fait naufrage. Il est ému par cette belle inconnue qui lui rappelle Clélia, une femme qu’il aimât jadis et qui est morte. Après son départ il découvre qu’elle a oublié son journal intime. Ce qu’il y lit le pousse à suivre à Paris celle qui s’appelle Sophie Clairsange.
A Paris, peu de temps après, on retrouve le corps d’une femme étranglée. C’est Loulou, une amie de Sophie Clairsange et de Mireille Lestocart. Connaissant le goût de Victor Legris pour les enquêtes, Mireille le charge de retrouver l’assassin de son amie. Victor sera aidé de Joseph Pignot, son commis, devenu son beau-frère depuis qu’il a épousé Iris, la demie-soeur de Victor.
Car le roman fourmille de personnages. Il y a aussi Kenji Mori, un Japonais, père d’Iris et associé de Victor. Tasha Kherson, la femme de Victor et la mère de Tasha, Djina, après qui soupire Kenji. Nous suivons tout ce petit monde dans le Paris de la fin du 19° siècle dont nous découvrons les petits métiers.
Derrière le pseudonyme de Claude Izner se cachent deux soeurs qui écrivent fort bien ma foi et nous proposent une bonne série de la collection Grands détectives chez 10-18.
Kavita Daswani, Mariage à l’indienne, le livre de poche
Anju, jeune femme native de Bombay, fait le désespoir de sa famille : elle a 32 ans et elle n’est toujours pas mariée. Pourtant sa mère s’est mise en chasse de bonne heure pour trouver le gendre idéal. Depuis que Anju a dix-sept ans elle a exploré toutes les possibilités. Au début la jeune fille a refusé les prétendants qui ne lui convenaient pas puis, petit à petit, ce sont les prétendants eux-mêmes qui se sont faits rares.
Enfin, pour échapper à la pression familiale qui se faisait de plus en plus lourde, Anju a arraché à ses parents l’autorisation d’aller étudier puis travailler aux Etats-Unis. Elle est devenue attachée de presse dans la mode et a commencé à s’émanciper. Cependant il est difficile de s’affranchir totalement de trente ans de matraquage permanent et elle est elle-même convaincue de la nécessité de se trouver un mari indien.
Au début du roman, Anju retourne en Inde, pour assister à un mariage, après deux ans d’absence. Pour sa mère et sa tante, c’est l’heure de se remettre en chasse.
Comme dans les nouvelles de Lavanya Sankaran (Le tapis rouge) on trouve ici une jeune femme tiraillée entre ses aspirations à une vie moderne et son souhait de complaire à ses parents plus traditionnels. Cependant chez Kavita Daswani la réalisation est moins bien réussie. Il y a de l’humour par instants mais j’ai aussi trouvé souvent la lecture fastidieuse. On s’englue dans la recherche du mari et on se demande comment on va s’en sortir (peut-être que cela vise à nous mettre à la place de l’héroïne qui doit aussi trouver le temps long). On a aussi droit à des descriptions presque techniques du métier d’attaché de presse et du monde superficiel de la mode qui m’ont parues superflues. Peut-être qu’ici une nouvelle aurait suffit.
William Dalrymple, Le moghol blanc, Noir sur blanc
L’histoire vraie d’une passion tragique dans l’Inde du 18° siècle
Ce gros livre bien documenté vaut beaucoup mieux que ne peut le laisser penser son sous-titre un peu racoleur.
L’histoire des amours de Khair-un-Nissa et de James Kirkpatrick sert de trame à une histoire des relations anglo-indiennes à la fin du 18° siècle.
Jeune fille de l’aristocratie moghole (Indienne musulmane) Khair-un-Nissa a 14 ans quand elle aperçoit pour la première fois James Kirkpatrick. Il en a 34 et est employé de la Compagnie des Indes Orientales qui exploite le sous-continent indien. Bien que déjà fiancée à un autre, Khair jette son dévolu sur James. Avec la complicité de sa mère et de sa grand-mère elle l’attire dans son lit puis les trois femmes intriguent pour rendre leur mariage possible. Déjà amateur de l’Inde et des Indiennes, Kirkpatrick se laisse séduire. Il se convertit à l’islam pour épouser Khair, adopte dans son ménage le mode de vie local.
William Dalrymple nous apprend qu’à l’époque la situation de Khair-un-Nissa et de James Kirkpatrick est loin d’être isolée. Parmi les premiers Européens installés en Inde aux 17° et 18° siècles plusieurs ont pris femme sur place et ont créé une nouvelle culture mélant leurs traditions d’origine et celles de leur pays d’accueil. La Compagnie des Indes Orientales recrutait ses employés avant l’âge de 16 ans. Ceux-ci arrivaient donc bien jeunes et encore malléables en Inde.
L’enquête de William Dalrymple se ramifie dans toutes les directions. Il a exploré archives familiales et publiques, en Grande-Bretagne, en France et en Inde pour nous présenter chacun de ses personnages ainsi que le contexte historique. Il cite fréquemment des passages de ses sources, particulièrement des lettres, ce qui rend le récit plus vivant. On n’est pas dans de l’histoire romancée comme chez Javier Moro (Une passion indienne) et j’aime bien mieux.
Mais Khair-un-Nissa et James Kirkpatrick font partie des derniers contemporains d’une époque où orient et occident n’ont pas trouvé impossible de s’unir. L’entrée dans le 19° siècle marque le début d’une période où l’homme blanc s’est cru supérieur et investi d’une mission civilisatrice. Sous l’impulsion de ses chefs, la Compagnie des Indes Orientales interdit petit à petit les unions entre ses employés et les autochtones, elle refuse d’embaucher les enfants de sang-mêlé. Chacun se replie de son côté et les différences religieuses sont montées en épingle.
Quant à l’histoire de Khair-un-Nissa et de James, elle se termine de façon bien triste.
Bharati
Fin octobre j’ai assisté à une représentation de Bharati, une comédie musicale indienne actuellement en tournée en France. L’histoire des amours de la belle Bharati (Bharat = Inde en hindi) n’est qu’un prétexte au spectacle de danses, chants et musique.
Elevée selon les traditions indiennes Bharati tombe amoureuse (et vice-versa) d’un jeune ingénieur occidentalisé. Le père de la jeune fille refuse le mariage jusqu’au moment où le jeune homme comprend qu’il ne peut pas rejeter ses origines (Bharat tumhara desh hai aur Bharati tumhara prem : l’Inde est ton pays et Bharati ton amour). Le père donne alors son assentiment. Un canevas tout à fait digne d’un film de Bollywood. Je trouve que ça ressemble un peu à l’histoire du film Swades.
Sur la scène, près de 70 artistes nous présentent l’histoire. Une cinquantaine de danseurs et danseuses dans de grands ballets avec toujours de nouveaux costumes. Encore une fois, la comparaison qui s’impose c’est celle avec les films de Bollywood : couleurs, mouvement, tout y est pour plaire aux amateurs (dont je suis).
Ils sont accompagnés par un petit orchestre indien. Une dizaine de musiciens assis de part et d’autre en avant de la scène. D’un côté les percussions (tablas), de l’autre les vents et les cordes.
Comme dans les films précédemment cités ce ne sont pas les danseurs qui chantent. Ils sont doublés par trois chanteuses et deux chanteurs. Les femmes en saris, les hommes en kurtas se tiennent immobiles et droits et accompagnent leurs chants d’amples mouvements du bras droit. Ils reprennent des standards de Bollywood plus des chansons originales. J’ai particulièrement apprécié Silsila ye chahaat ka tiré du film Devdas. C’était parfait. La chanteuse était tout simplement excellente.
Et puis il y a les personnages principaux : Bharati, son père, son amoureux, son ami d’enfance (bien sur, il y a un ami d’enfance!) qui dansent des solos et enfin, le narrateur. Dans ce rôle Rahul Vohra (au cinéma vu dans Swades, dans le rôle de l’ami du héros, expatrié comme lui) est très bon. En fait c’est lui le personnage principal. il raconte l’histoire, explique l’Inde aux spectateurs, fait patienter entre deux grands ballets (quand les danseurs doivent aller se changer) en racontant de petites histoires humoristiques. Et tout cela dans un Français presque parfait.
Quand j’aurai dit qu’en plus de tout ce monde en action il y a un écran au fond de la scène qui montre des images de l’Inde, qui sert d’arrière-plan aux ballets, vous aurez compris que dans ce spectacle on ne sait pas où donner de l’oeil. A droite, à gauche, devant, derrière, il y a à voir de tous les côtés. Je n’ai pas regretté ma soirée.
Iain Pears, Le cercle de la croix, Pocket
Oxford, 1663. Le professeur Grove est retrouvé mort dans son appartement. L’enquête laisse penser qu’il a été empoisonné. Rapidement la rumeur publique accuse sa servante du crime. Elle est arrêtée, jugée et exécutée. Que s’est-il réellement passé ? Quatre témoins présentent à tour de rôle leur version des faits.
Le premier est Marco da Cola, gentilhomme vénitien qui a étudié la médecine par curiosité aux Pays-Bas et qui se trouve en Angleterre pour y régler des affaires familiales. A Oxford, Cola fréquente les scientifiques les plus en avance de leur temps: Robert Boyle, père de la chimie et Richard Lower, médecin et physiologiste. Son récit nous fait pénétrer dans une société où les idées bouillonnent. On pratique les dissections pour tâcher de comprendre le fonctionnement du corps humain, on s’interroge sur la circulation et le rôle du sang. Les hypothèses fusent, mélange d’intuitions géniales et de croyances naïves.
Le deuxième témoin est Jack Prestcott. Le père de ce jeune homme, intransigeant soutien du parti royaliste pendant la guerre civile (1642-1648) et la république de Cromwell (1649-1659) est mort en exil, accusé d’avoir trahit les siens. Jack, persuadé que son père a été calomnié, mène l’enquête pour prouver son innocence et trouver le véritable traître. Avec lui on découvre qu’une légère épuration a suivi la restauration monarchique de 1660 mais que certains qui avaient servi fidèlement Cromwell sont restés aux affaires sous Charles 2 tandis que des nobles qui s’étaient battus pour le roi ont été bien mal récompensés de leurs sacrifices. Les événements sont frais et les rancoeurs encore vivaces.
Le troisième témoin est le docteur John Wallis. Mathématicien psycho-rigide, fasciné par les chiffres, il joue aussi le rôle d’espion du gouvernement, décryptant les messages codés. Voyant des complots partout, il est persuadé que Cola est venu en Angleterre pour y accomplir de funestes desseins et cherche à percer son secret.
Arrivé aux trois-quarts du livre le lecteur ne sait plus trop que penser : on lui a présenté trois coupables potentiels et aucun n’est vraiment très convaincant. Surtout, chaque témoin analyse les événements auxquels il a assisté à l’aune de ses marottes et du coup les mêmes situations sont décrites différemment par chacun.
Enfin arrive le quatrième témoin, l’historien John Wood qui vient éclaircir tout cela et en même temps amener de nouveaux sujets de questions.
En plus de tout ce que nous apprenons sur l’Angleterre de cette époque, le talent de Iain Pears réside dans sa capacité à se mettre dans la peau de ses personnages. Chacun des quatre récits est rédigé à la première personne et sur un ton propre qui fait passer le mode de pensée et de fonctionnement de chaque personnage. Ce qui frappe c’est, malgré leurs différends et leurs différences, l’emprise de la religion sur ces esprits. Même les plus rationnels ne peuvent pas trouver d’argument plus irréfutable que : « C’est écrit dans la Bible ».
Un passionnant éclairage sur une époque et une société en train d’évoluer mais encore bien plongées dans les ténèbres.
Amit Chaudhuri, Une étrange et sublime adresse, Picquier
Un jeune garçon de Bombay, Sandeep, passe ses vacances à Calcutta chez son oncle et sa tante et ses cousins Abhi et Babla. L’étrange et sublime adresse du titre c’est celle de la maison de Calcutta que Sandeep découvre ainsi écrite dans un livre de classe de son cousin Abhi :
« Abhijit Das
17 Vivekananda Road
Calcutta (Sud)
Bengale Ouest
Inde
Asie
Terre
Système Solaire
Univers »
Dans cette maison où se retrouvent les membres de la famille élargie le temps coule doucement. Les adultes discutent et font la sieste, les enfants jouent entre eux. Le soir on monte sur la terrasse prendre le frais et observer les voisins :
« Un bambin apprenait à marcher : il avançait un pied hésitant et prudent puis effectuait un pas avec une conviction mélodramatique; l’autre jambe oubliait qu’elle était jambe et l’enfant, dérouté par son propre corps, s’affaissait comme un petit tas. Alors il se mettait à pleurer et ses larmes faisaient sourire sa grande soeur. Elle se penchait vers lui et le soulevait dans ses longs bras adorables. »
Il ne se passe rien de particulier mais tout le livre est empreint de poésie et de la nostalgie d’une enfance paisible et insouciante. C’est particulièrement bien écrit, les descriptions sont travaillées, utilisant des comparaisons imagées :
« Au démarrage, le moteur et la carrosserie déglinguée unissaient leurs voix en un grincement caverneux, comme un vieux qui balance une plaisanterie obscène en dialecte guttural tout en continuant de s’esclaffer. »
En bref c’est un régal à lire et c’est pourquoi je ne résiste pas au plaisir de citer un dernier passage :
« Calcutta est une ville de poussière. Quand on se promène dans ses rues, on voit sur les trottoirs des monticules de poussière hauts comme des dunes, où chiens et enfants restent assis à ne rien faire, tandis que des ouvriers en sueur défoncent le macadam à coup de pioches et de marteaux-piqueurs. Sans cesse on démolit les routes, soit pour la construction du nouveau métro soit pour tout autre raison obscure, comme le remplacement d’une canalisation qui ne marche pas par une autre qui ne marche pas mieux. Calcutta se met alors à ressembler à une oeuvre d’art contemporain dénuée de sens et de fonction, mais qui continue d’exister pour quelque raison esthético-ésotérique. Partout des tranchées et des tas de poussière donnent à la ville l’air d’avoir été pilonnée. Les vieilles maisons aux murs apaisés s’effritent en lente poussière, leurs portails jadis rutilants sont désormais rouillés. Du plafond des bureaux s’écaille la poussière; les bâtiments tombent en poussière, les routes se font poussière. Sans cesse, sous l’action arbitraire du vent, la poussière s’érige en formes nouvelles surprenantes, des formes sur lesquelles les chiens et les enfants restent assis à ne rien faire. Jour après jour, sans un murmure, Calcutta part en poussière, et jour après jour, Calcutta renait de sa poussière. »
Radhika Jha, L’odeur, Picquier
D’origine indienne Lîla est née et a grandi au Kenya. Quand le père de famille est tué, victime d’une émeute, la famille doit se disperser. Sa mère et ses deux jeunes frères sont accueillis chez un parent en Grande-Bretagne. Quant à Lîla, âgée de 18 ans, elle est envoyée chez le frère de son père, en banlieue parisienne.
Une période difficile commence alors pour Lîla. Sur le chemin de l’émancipation elle doit couper les liens avec sa famille, son oncle et sa tante qui l’utilisent comme domestique, sa mère qui l’oublie pour se remarier. Elle découvre l’attrait qu’elle exerce sur les hommes, des hommes pas toujours désintéressés.
Sa particularité est d’avoir un odorat particulièrement développé. Cette faculté est une bénédiction ou une malédiction. Bénédiction quand elle se met à la cuisine car les épices et les ingrédients lui parlent par l’odeur et elle sait sans goûter ce qu’il faut pour obtenir le plat parfait.
Malédiction dans ses périodes difficiles car alors elle ne peut littéralement plus se sentir. Elle a l’impression qu’elle pue et que tout le monde s’éloigne d’elle, dégoûté par cette odeur infecte :
« Mon odeur de pourri m’enrobe comme un linceul et fermente avec suavité. Je décide que mon corps pue plus fort qu’une benne à ordures. A l’inverse du camion à ciel ouvert où s’accrochent chaque jour les éboueurs, mon odeur reste bouclée à l’intérieur, en un lieu privé d’air et de lumière et filtre par tous mes pores comme un redoutable déchet chimique auquel personne ne veut toucher. Je sens ses relents d’épices tout autour de moi, agglutinés à l’air humide, et la puanteur d’aliments pourris s’accentue chaque fois que je prends une inspiration. »
Il faudra à Lîla rencontrer enfin des personnes qui l’apprécient pour elle-même pour comprendre que cette puanteur n’était qu’une barrière qu’elle érigeait entre elle et le monde et accepter de prendre en main sa vie.
Je pense que L’odeur retranscrit bien les sentiments et l’état d’esprit dans lequel peut se trouver une jeune fille de 18 ans, livrée à elle-même dans un pays étranger. Radhika Jha montre bien la difficulté d’accéder à l’indépendance quand on n’est pas entouré par des personnes bienveillantes.
Anne Pery, Half moon street, 10-18
Le cadavre d’un homme vêtu d’une robe verte et menotté est retrouvé dans une barque sur la Tamise. La mise en scène a été réalisée après la mort. Qui en voulait à Delbert Cathcart, un photographe talentueux au point de l’installer dans cette posture scandaleuse qui choque tous les témoins ?
En l’absence de sa femme en vacances en France, Thomas Pitt enquête avec le sergent Tellman dans le milieu du théâtre ou il croise des acteurs désireux de s’opposer à la censure qui menace leurs pièces.
La liberté d’expression doit-elle être totale s’interroge Anne Perry à travers ce roman ? Pour faire avancer les idées, peut-on tout dire et tout montrer, même la pornographie ou faut-il protéger les personnes les plus vulnérables par la censure ? Le dénouement apporte un élément de réponse brutal à ces questions.
Iain Pears, Le songe de Scipion, Pocket
En Provence, à trois époques différentes, trois hommes assistent à la chute de leur civilisation.
Manlius Hippomanes à la veille de la chute de l’empire romain, au moment où la Gaule est envahie par les barbares.
Olivier de Noyen, au début du 14° siècle ravagé par la peste noire.
Et Julien Barneuve en 1940, dans la France vaincue et occupée par les Allemands.
A ces trois périodes les Juifs sont persécutés, jugés responsables des malheurs du temps. Face au triomphe de la barbarie et des instincts bestiaux comment l’intellectuel doit-il réagir ? Peut-on pactiser avec l’ennemi dans le but de le civiliser ? Ce sont les questions que se posent ces trois hommes et auxquelles ils répondent en s’engageant avec plus ou moins de succès.
Dans ce roman où Iain Pears entrelace les destins de ses trois personnages l’humour qui m’avait réjouie dans la série des aventures de Jonathan Argyll et Flavia di Stephano fait défaut. Il faut dire que le sujet s’y prête moins sans doute. Le résultat en est une lecture parfois un peu rébarbative. Il faut s’accrocher au début pour entrer dans l’action qui est rarement trépidante. Cependant j’ai apprécié la description des conditions de vie à la fin de l’empire romain. Iain Pears sait de quoi il parle et cela donne envie d’en apprendre plus sur cette époque.