La femme et les deux jeunes enfants du narrateur, David Zimmer, sont morts dans un accident d’avion. Après cette catastrophe, David traverse une période de profonde dépression. Un jour, en regardant un documentaire à la télévision, il découvre l’existence d’Hector Mann. Hector Mann était un acteur comique de l’époque du cinéma muet. Il a eu un certain succès avant de disparaître en 1929 : il est parti de chez lui, abandonnant toutes ses affaires et personne n’a plus jamais entendu parler de lui. Un extrait d’un film d’Hector Mann fait rire David Zimmer et c’est la première fois qu’il rit depuis des mois.
Dans un sursaut vital pour échapper au désespoir il décide d’écrire un livre consacré à l’oeuvre d’Hector Mann. Après la parution du livre David Zimmer reçoit une lettre d’une femme qui se prétend l’épouse d’Hector Mann. Celui-ci serait encore vivant, 60 ans après sa disparition, et souhaiterait rencontrer Zimmer. David croit d’abord à un canular et temporise mais un soir une jeune femme se présente à sa porte : elle est envoyée par l’épouse d’Hector Mann pour le convaincre de se rendre au chevet de ce dernier.
Voilà un très bon Paul Auster que j’ai lu d’une seule traite. Comme toujours c’est bien écrit et les personnages ont des vies hors du commun avec de nombreux rebondissements. Les détails sont tellement précis que je me suis demandé un moment si Hector Mann n’avait pas existé pour de vrai.
On retrouve dans le livre des illusions des thèmes chers à Paul Auster : un personnage disparaît et tout le monde le croit mort (comme dans Leviathan ou dans Moon Palace). Un artiste crée des oeuvres que personne ne verra jamais (comme dans Moon Palace).
Il est aussi question de responsabilité et de comment expier ce dont on est coupable.
Siri Hustvedt, Tout ce que j’aimais, Babel
Léo, le narrateur, un homme vieillissant, se penche sur son passé et égrène ses souvenirs depuis l’époque de son mariage. Léo et Erica, sa femme, vivent à New-York et sont tous les deux professeurs d’université. Léo se lie d’amitié avec Bill, un artiste peintre. Bill est marié à Lucille, puis ils divorcent et Bill épouse Violet. Après ce deuxième mariage, les deux couples deviennent très proches. Ils habitent dans le même immeuble, déjeunent régulièrement les uns chez les autres, passent leurs vacances ensemble. Comme Léo et Bill, Erica et Violet sont très proches l’une de l’autre.
Toute la première partie est empreinte d’une nostalgie douce, de l’amitié vraie, de l’heureux temps passé.
Mais le malheur va frapper durement ces deux familles et les événements prennent petit à petit une tournure inquiétante.
Dans ce livre, comme dans le précédent que j’ai lu (La fille qui marchait sur l’eau) il est question de la mort d’un enfant et de ses parents qui s’éloignent l’un de l’autre après cette tragédie, incapables de continuer à vivre ensemble mais incapables aussi de se séparer complètement. Mais il est question aussi d’une situation même plus difficile pour des parents que la mort d’un enfant.
L’action s’accélère et s’éloigne de la tranquillité du début pour atteindre à une forme d’angoisse. La note positive c’est que l’amitié survit aux coups du destin et est une aide pour les encaisser.
J’ai beaucoup aimé ce livre. Il est bien écrit et de plus en plus prenant à mesure qu’on avance dans sa lecture. Siri Hustvedt est la femme de Paul Auster et par sa qualité d’écriture, par le fait que l’action se situe dans le même milieu intellectuel new-yorkais, ce livre m’a parfois fait penser à du Paul Auster. J’ai l’intention de me procurer d’autres livres de cet Siri Hustvedt.
Paul Auster, Moon Palace, Babel
Le héros et narrateur, Marco Stanley Fogg n’a jamais connu son père. Sa mère est morte quand il était encore enfant et il a été ensuite élevé par son oncle. L’histoire commence à la mort de l’oncle. M. S. Fogg se retrouve seul au monde. Mais laissons plutôt Paul Auster nous raconter lui-même ce qui va se passer, il le fait si bien.
Le livre débute ainsi :
« C’était l’été où l’homme a pour la première fois posé le pied sur la Lune. J’étais très jeune en ce temps-là, mais je n’avais aucune foi dans l’avenir. Je voulais vivre dangereusement, me pousser aussi loin que je pourrais aller, et voir ce qui se passerait une fois que j’y serais parvenu. En réalité j’ai bien failli ne pas y parvenir. Petit à petit, j’ai vu diminuer mes ressources jusqu’à zéro; j’ai perdu mon appartement; je me suis retrouvé à la rue. Sans une jeune fille du nom de Kitty Wu, je serais sans doute mort de faim. Je l’avais rencontrée par hasard peu de temps auparavant, mais j’ai fini par m’apercevoir qu’il s’était moins agi de hasard que d’une forme de disponibilité, une façon de chercher mon salut dans la conscience d’autrui. Ce fut la première période. A partir de là, il m’est arrivé des choses étranges. J’ai trouvé cet emploi auprès du vieil homme en chaise roulante. J’ai découvert qui était mon père. J’ai parcouru le désert, de l’Utah à la Californie. Il y a longtemps, certes, que cela s’est passé, mais je me souviens bien de cette époque, je m’en souviens comme du commencement de ma vie. »
Cette première page est à relire après avoir tourné la dernière car c’est seulement alors qu’on sait que ce résumé qui semblait au départ un peu étrange dit parfaitement ce qu’est le livre. L’auteur nous parle de genèse, de rencontres et de voyage initiatiques. On retrouve ici des thèmes assez récurents chez Paul Auster, il me semble.
Tout ceci est fort bien écrit et jamais ennuyant : il y a de l’aventure et une réflexion philosophique.