Un ministre du gouvernement de sa majesté et sa maîtresse égyptienne ont été pris en pleine nuit, transportant un cadavre dans une brouette. Thomas Pitt, toujours à la special branch, est mis sur l’affaire. Sa mission : innocenter le ministre. Pour cela notre héros devra aller jusqu’en Egypte, fouiller dans le passé de certains protagonistes. Pendant ce temps Charlotte mène aussi l’enquête de son côté : le frère d’une jeune domestique du quartier n’a plus donné signe de vie depuis plusieurs jours. Dans la maison où il était employé on ne veut donner aucune explication. Quel secret cherche-t-on à cacher ? Notre héroïne devra s’enfoncer jusque dans le quartier sordide de Seven dial pour trouver les réponses.
J’ai retrouvé dans cette palpitante aventure de Thomas Pitt tous les ingrédients qui font pour moi le talent de Anne Perry. Des personnages secondaires fouillés : la tante Vespasia, toujours en forme malgré son grand âge; Gracie la jeune bonne des Pitt dont la romance avec l’inspecteur Tellman progresse à grands pas; Victor Narraway le nouveau supérieur de Pitt qui laisse échapper un peu de son passé. Tout cela allant de pair avec une analyse psychologique fine.
Boris Akounine, Pélagie et le bouledogue blanc, Presses de la cité
Au 19° siècle, dans une province un peu reculée de Russie, Pélagie, une jeune religieuse orthodoxe, est dépêchée par son évêque, le bon Mitrophane, pour mener l’enquête sur des événements qui agitent les alentours. La tante de l’évêque, qui a consacré une bonne partie de sa vie à créer une nouvelle race de chiens (le bouledogue blanc) est au plus mal : on a assassiné l’un de ses spécimens et le choc est terrible pour la vieille femme.
Sur sa route Pélagie croise deux cadavres décapités. A Zavoljsk, chef-lieu du comté, Mitrophane est aux prises avec le perfide Tintinov, inspecteur du synode. Bien sur toutes ces affaires se rejoindront pour la plus grande gloire de Mitrophane et pour la sauvegarde des âmes de Zavoljsk.
Pélagie et le bouledogue blanc est le premier épisode d’une trilogie par l’auteur des aventures de Fandorine. J’étais toute contente de mettre la main sur cette nouvelle série et j’ai été un peu déçue. La mise en place de l’action est un peu lente et la lecture ne devient palpitante que dans la deuxième partie.
La quatrième de couverture informe le lecteur qu’il trouvera dans le style « de subtils pastiches des grands prosateurs russes du 19° siècle. » Je dois avouer que c’est un aspect de l’oeuvre qui m’échappe, ne connaissant pas cette littérature. Il reste quand même l’humour de Boris Akounine.
Boris Akounine, La maîtresse de la mort, Presses de la cité
Tandis qu’il passe ses journées dans les bas-fonds de Moscou pour trouver l’auteur de crimes horribles (cf L’amant de la mort) Fandorine, en soirée, cherche à résoudre le mystère d’une vague de suicides. Les victimes sont les membres d’une société secrète, sorte de secte où on adore la Mort comme la maîtresse suprême (ou l’amant pour les femmes). Les recrues écrivent (avec plus ou moins de talent) des poèmes qui célèbrent l’union avec la Mort et attendent avec impatience le moment où cette dernière leur fera signe de la rejoindre. Mais la Mort ne disposerait-elle pas d’un complice bien vivant ? Fandorine devra se faire passer pour un candidat au suicide convaincant afin de le démasquer.
Comme indiqué en quatrième de couverture La maîtresse de la mort complète L’amant de la mort que j’avais lu avant. Ceci dit, bien que les deux aventures se déroulent simultanément elles sont cependant indépendantes l’une de l’autre. Fandorine évolue dans des milieux bien différents. Dans La maîtresse de la mort ce n’est pas un gamin des rues qu’il a pris sous son aile mais une jeune fille de la petite bourgeoisie qui cherche à mettre un peu de piment dans sa vie. Je n’ai relevé que trois moments où les deux scénarios se croisent, s’effleurent devrais-je dire tellement c’est léger. L’intérêt de cet exercice de style est donc plutôt théorique. Pour moi je retiens surtout les qualités habituelles de Boris Akounine : une enquête palpitante, de l’humour, un héros sympathique et séduisant.
Boris Akounine, L’amant de la mort, Presses de la cité
Le jeune Senka est un orphelin qui vit d’expédients à Moscou à la fin du 19° siècle. Avec d’autres gamins des rues il dérobe leurs biens aux passants inattentifs. C’est ainsi qu’il met la main sur un chapelet de jade. Il se trouve cependant que ce chapelet appartient au héros de la série, Eraste Petrovitch Fandorine, qui y est sentimentalement attaché.
Fandorine récupère facilement son chapelet mais sa rencontre avec Senka l’entraîne dans une nouvelle aventure et l’emmène à faire connaissance avec la pègre de Moscou. Un assassin sans pitié est à la recherche d’un trésor caché et n’hésite pas à torturer ou à tuer des enfants pour parvenir à son but. Une mystérieuse jeune femme d’une grande beauté affole tous les hommes. On la surnomme la Mort. Comment ce joli-coeur de Fandorine pourrait-il lui résister ?
Ce huitième épisode des aventures de Fandorine est aussi réjouissant à lire que les précédents. Ici, l’histoire est racontée du point de vue du jeune Senka et ses commentaires sont généralement truffés de mots d’argot. On descend dans les bas-fonds de Moscou qui ressemblent beaucoup à ceux de Londres décrits par Anne Perry.
L’amant de la mort est accompagné d’un deuxième tome, La maîtresse de la mort. Boris Akounine nous informe que « quoique absolument distincts, ces deux romans créent, ensemble, un effet stéréo que seul le lecteur qui les lira tous les deux, dans l’ordre qu’il souhaite, entendra. » Appétissant, non ? Je m’attèle donc à La maîtresse de la mort ayant eu la chance de mettre la main sur les deux en même temps à la bibliothèque.
Iain Pears, l’énigme de San Giovanni, 10-18
Revoici Flavia di Stefano et Jonathan Argyll à la poursuite des voleurs d’œuvres d’art. Mais Bottando ayant été appelé à de plus hautes responsabilités c’est Flavia qui doit maintenant assumer la direction du service de police spécialisé dans ce domaine.
Une petite icône, apparemment sans valeur, a été dérobée au monastère San Giovanni de Rome. Autour du tableau évoluent un certain nombre de personnages plus ou moins impliqués dans le vol. Un restaurateur d’œuvres d’art aux méthodes controversées, un richissime collectionneur grec et son fils chef de gang, une habile voleuse à la retraite et même le supérieur du couvent désireux de renflouer ses caisses.
L’intrigue et l’enquête sont plutôt bien ficelées mais je n’ai pas trop apprécié la morale de l’auteur. Ainsi la voleuse qui a passé sa carrière à écumer les collections publiques et privées d’Italie présente son action comme une simple redistribution. Ceux qu’elle a volés pouvaient se passer de leur bien. Certes mais voler aux riches pour revendre aux riches ça n’est pas pour moi de la redistribution. J’ai été aussi choquée par la façon dont l’homme d’affaires grec règle à la fin les problèmes posés par son fils. Il me semble, contrairement à l’auteur, que c’est une étrange façon d’assumer ses responsabilités.
Anne Perry, Southampton row, 10-18
Ce nouvel épisode des enquêtes de Thomas Pitt est la suite du précédent. Dans La conspiration de Whitechapel, notre héros avait sauvé la couronne d’Angleterre d’un complot diabolique. Le revoilà aux prises avec les machinations du cercle intérieur et la perfidie de son chef Voisey. Mais cette fois c’est seul que Thomas doit enquêter et supporter la pression de l’affaire car Charlotte, Gracie et les enfants sont à la campagne en vacances et pour les protéger des ennemis de Thomas.
Comme toujours chez Anne Perry, la société victorienne est décortiquée et les sentiments des personnages analysés à fond. On rencontre ainsi Isadora Underhill, femme d’évêque qui s’aperçoit après trente ans de mariage qu’elle n’aime pas son mari. Pire encore, elle n’arrive même pas à se souvenir si elle l’a jamais aimé. Aussi, tout en assistant aux sermons de l’évêque, elle rêve qu’elle part sur la mer avec l’amiral Cornwallis. C’est aussi le talent d’Anne Perry de savoir camper des personnages secondaires attachants.
Paul Harding, L’auberge du Paradis, 10-18
Londres, automne 1380. Trois cadavres sont découverts dans une maison abandonnée de la paroisse de Southwark. L’un d’entre eux est celui d’un messager royal et si son assassin n’est pas retrouvé la paroisse sera considérée comme complice et devra payer une forte amende. Frère Athelstan, curé de la paroisse et secrétaire du coroner de Londres, sir John Cranston, se lance dans l’enquête avec ce dernier. Nos deux héros doivent mener deux enquêtes de front car au même moment une riche veuve est accusée d’avoir commis deux assassinats. Elle se prétend innocente pourtant tout semble l’accuser.
L’intérêt principal de ce roman, neuvième enquête du frère Athelstan et de sir John Cranston est de nous faire découvrir la vie quotidienne au Moyen-âge. Par contre j’ai trouvé l’enquête un peu poussive.
Iain Pears, Le mystère Giotto, 10-18
En Italie, le général Bottando, chef du service de la protection du patrimoine historique soupçonne un habile et mystérieux personnage qu’il a surnommé Giotto d’avoir réussi à voler de nombreux tableaux en toute impunité depuis trente ans. Ces soupçons sont ravivés par une lettre dont l’auteur s’accuse d’avoir eu connaissance d’un de ces vols. Bottando lance alors l’enquêtrice Flavia di Stefano sur les traces de Giotto. Il est d’autant plus important qu’elle réussisse que Bottando est menacé dans son propre service par les menées d’un arriviste qui vise sa place.
Avec son fiancé Jonathan Argyll, marchand d’art, Flavia mène l’enquête jusqu’en Angleterre pour dénicher Giotto.
Entre l’Italie et l’Angleterre Iain Pears (qui écrit en Anglais) a choisi l’Italie. La Grande-Bretagne nous est décrite comme un pays où des trains bondés et délabrés partent en retard (quand ils partent) dans l’indifférence générale et où il faut disposer d’un bon chauffage central pour supporter les rigueurs de l’été. L’autre cible des piques de Iain Pears c’est l’administration, systématiquement inefficace et paperassière. Les attaques sont faites avec humour et si on ne se formalise pas du parti-pris le tout est facile et agréable à lire. Il ne laissera pas de souvenir impérissable non plus.
Boris Akounine, Le couronnement, 10-18
A l’occasion du couronnement du tsar Nicolas II, un machiavélique personnage, le docteur Lind, enlève le jeune prince Mikhaïl Guéorguiévitch, cousin de l’empereur. Pour le relâcher il réclame l’Orlov, diamant qui orne le sceptre impérial. C’est notre héros, Eraste Pétrovitch Fandorine -dont c’est ici la septième aventure- qui va mener l’enquête, tenter de récupérer l’enfant, sauver l’Orlov et arrêter le docteur Lind. Mais quel suspens quand la mort de Fandorine nous est annoncée dès la première page et que le roman est un flash-back, narration des faits qui nous ont mené là.
Le narrateur est Afanassi Stépanovitch Zioukine, majordome de Guéorgui Alexandrovitch, le père du petit prince enlevé. Il évolue au milieu de toutes ces péripéties sans se départir jamais de son sens du protocole. Et la deuxième caractéristique du roman c’est l’humour provoqué notamment par le décalage permanent entre les frasques des membres de la famille impériale et le jugement que ce personnage compassé porte sur eux.
Un méchant démoniaque, un récit plein d’humour, une fin tragique : on retrouve tous les éléments caractéristiques des aventures de Fandorine. Une fois de plus Boris Akounine réussit un roman qui se lit d’une traite.
Anne Perry, La conspiration de Whitechapel, 10-18
Avril 1892. La déposition du commissaire Thomas Pitt au procès de John Adinett, membre respecté de la haute société londonienne, convainc le jury que celui-ci est coupable du meurtre de son ami Martin Fetters. Quel en était le mobile ? C’est ce qui n’a pas pu être déterminé car Adinett continue de nier malgré sa condamnation à mort.
L’affaire semble cependant terminée mais voilà que Pitt est saqué pour le rôle qu’il y a joué. Démis de ses fonctions de commissaire de Bow street il est versé dans la Special Branch, sorte de Renseignements Généraux qui sont chargés de collecter des informations sur les agissements des agitateurs irlandais ou républicains et de les contrecarrer. Pitt doit quitter son foyer et sa famille et venir s’installer dans l’east end de Londres, dans le sordide quartier de Whitechapel.
Pendant que Pitt s’adapte à cette nouvelle existence, sa femme Charlotte, sa bonne Gracie et son ancien adjoint Tellman mènent l’enquête pour comprendre pourquoi Adinett a tué Fetters. Il sera question d’un terrible complot pour renverser la monarchie et d’une société secrète prête à tout pour parvenir à ses buts. Et, puisqu’une partie de l’action se déroule à Whitechapel, il sera aussi question de Jack l’Eventreur qui y sévit quelques années plus tôt.
Comme à son habitude Anne Perry mène de main de maître cette 21° aventure du commissaire Pitt. C’est palpitant et une fois commencé le roman je n’ai pas pu le lâcher avant la fin. J’ai quand même résisté -avec difficulté- à l’envie de lire le dénouement avant d’en avoir terminé.