Le docteur Hilla Driver a hérité d’une vieille maison coloniale au bord de la mer dans les environs de Bombay. Elle envisage de la transformer en pension de luxe. Pour lancer son projet elle organise un week-end d’inauguration auquel elle convie amis et personnalités en vue : un écrivain, un danseur, un top model, un critique gastronomique… Il y a aussi un cuisinier de talent qui a promis de surprendre les plus difficiles. Le but pour Hilla est de faire parler d’elle en page 3, la page people des journaux. Pour ça, elle va être servie.
Quand le cuisinier présente à chaque convive un plat spécial qui lui rappelle un événement de son passé, certains souvenirs ne sont pas les bienvenus. C’est alors que la scène se transforme en huis-clos avec l’intervention d’une pluie diluvienne qui empêche toute communication avec l’extérieur. Un des participants est assassiné. L’enquête est prise en charge par miss Lalli, policière à la retraite, amie de Hilla et invitée avec sa nièce, la narratrice, qui va lui servir d’assistante.
Un point de départ assez classique (l’assassin est forcément un des invités) et une enquête plutôt bien ficelée. Il y a du suspense et aussi des indices qui permettent de deviner certaines choses.
Frank Tallis, Les mensonges de l’esprit, 10-18
Un garçon de 15 ans, élève boursier dans l’école militaire Saint Florian, est retrouvé mort dans la salle de sciences de l’école. L’autopsie conclu à des causes naturelles. Cependant, après une visite à Saint Florian, l’inspecteur Oskar Rheinhardt éprouve un désagréable pressentiment et décide de poursuivre l’enquête. Des bruits courent de brimades dont seraient victimes les élèves boursiers ou étrangers de la part de camarades incités par certains professeurs à se considérer comme des sur-hommes.
Pour amener des adolescents terrorisés ou convaincus de leur supériorité à livrer des informations à la police le psychiatre Max Liebermann, ami de Rheinhardt, use de toutes ses connaissances de l’esprit humain et expérimente l’interprétation de tâches d’encre, pas encore connues sous le nom de test de Rorschach.
Une fois de plus nous retrouvons les germes de l’idéologie nazie dans la Vienne de 1903, de façon moins marquée que dans l’épisode précédent cependant. L’auteur nous convie aussi à découvrir les débuts de la psychanalyse à l’occasion d’entretiens entre Liebermann et son maître Freud.
La ville de Vienne est le théâtre vivant de cette enquête palpitante : les cafés où nos héros fument cigare sur cigare en dégustant de délicieuses pâtisseries ; le Prater, luna park permanent où a été reconstituée une petite Venise avec ses gondoles ; la population cosmopolite venue de toutes les régions de l’empire. J’allais oublier la musique, ce qu’elle exprime et la façon de la jouer (Liebermann est pianiste et Rheinhardt baryton). Frank Tallis montre son talent en rendant ce sujet intéressant, même pour moi qui n’y connait pas grand chose.
Enfin l’évolution de la vie amoureuse du bon docteur, si sympathique, n’est pas le moindre des sujets d’intérêt de cette série. Ici il expérimente la jalousie et le fait qu’il est toujours plus facile pour un psychiatre d’analyser les réactions des autres que les siennes propres. Tout cela est intelligent et fin et l’auteur nous fait cadeau d’apartés ironiques toujours bienvenus.
Voilà, j’en ai terminé avec les trois épisodes parus à ce jour et je dois maintenant attendre que Frank Tallis en publie un nouveau.
Frank Tallis, Du sang sur Vienne, 10-18
Hiver 1902, à Vienne. Un tueur en série commence une vague de meurtres particulièrement atroces. Les victimes, d’abord des prostituées, sont mutilées et l’assassin laisse des signes -ou messages- étranges derrière lui. Chargé de l’enquête l’inspecteur Rheinhardt requiert l’aide de son ami, le psychiatre Max Liebermann, pour l’aider à interpréter les mises en scène du criminel et percer ainsi à jour sa personnalité.
Dans cette aventure encore plus passionnante que la précédente, nos héros vont se confronter à des théoriciens pangermaniques, officiers et intellectuels convaincus de la supériorité teutone, véritables nazis avant l’heure. L’épisode où Liebermann rive son clou sur son propre terrain à un compositeur antisémite est particulièrement réjouissant.
Dans le même temps le bon docteur se pose de plus en plus de questions sur ses fiançailles. Il doute de son engagement et a bien des difficultés à prendre une décision.
Voilà une série qui, par l’époque à laquelle elle se déroule et par l’analyse psychologique fine des personnages, me fait assez penser à celles d’Anne Perry. Elle est au moins aussi bonne. Aussi, à peine terminée la lecture de cet excellent ouvrage, je me suis ruée chez mon libraire-disquaire pour y faire l’emplette du troisième volume et d’un enregistrement de La flûte enchantée de Mozart qui joue un rôle important dans cette histoire. Si j’ai trouvé le premier, il faudra repasser pour le second: on ne me proposait que des extraits (à un prix défiant toute concurrence, il faut le dire). Chez Harmonia Mundi l’opéra est en commande et sera disponible la semaine prochaine.
Frank Tallis, La justice de l’inconscient, 10-18
L’action de cette série de la collection « Grands détectives » se déroule à Vienne au début du 20° siècle. Son héros est Max Liebermann, jeune médecin psychiatre adepte des théories de Freud. Un choix professionnel qui le met dans une position difficile quand il s’oppose à son chef de service à l’hôpital, partisan de l’électrothérapie pour traiter l’hystérie. Max Liebermann est également pianiste et amateur de musique classique qu’il pratique régulièrement avec son ami, le baryton Oskar Rheinhardt, par ailleurs inspecteur de police.
Quand une spirite est retrouvée assassinée dans une pièce fermée à clef de l’intérieur; que l’arme du crime, un pistolet, a disparu ainsi que la balle qui pourtant n’a pas traversé le corps; Rheinhardt a fort à faire. Il fait appel aux talents d’analyste de son ami pour interroger les témoins, certains même sous hypnose. L’aide de Miss Lydgate, une ancienne patiente de Max, sera aussi décisive.
J’ai dévoré d’une traite cet excellent ouvrage. Les héros sont sympathiques, les personnages finement analysés ont une vraie profondeur. Le cadre de la ville de Vienne, ses cafés, la musique, est bien exploité. Frank Tallis, docteur en psychologie lui-même, écrit bien et avec humour. Je termine donc l’année sur une très bonne lecture et je me jette aussitôt sur le deuxième épisode pour bien commencer 2009.
Yves Josso, Eté meurtrier à Pont-Aven, 10-18
L’histoire se déroule à Pont-Aven en 1886. Clémence de Rosmadec, jeune fille de bonne famille, vient passer l’été chez sa grand-mère, dans la maison familiale de la Josselière. Clémence est peintre et compte bien profiter de son séjour pour perfectionner son art -peut-être au contact de M. Gauguin, encore peu connu mais dont elle admire le travail.
Mais voilà que dès les premier jours Clémence découvre le cadavre d’une jeune femme, modèle peu farouche qui posait nue -et plus si affinités- pour les peintres des environs. C’est Gildas, ami d’enfance de Clémence, qui est désigné comme le parfait suspect pour ce crime. Mais notre héroïne ne croit pas à la culpabilité du jeune marin et va tout mettre en oeuvre pour l’innocenter.
Avec ce roman Yves Josso a manifestement voulu instruire le lecteur sur les peintres de Pont-Aven, la querelle des académiques et des impressionnistes; les us et moeurs de la Bretagne et même la musique classique puisque la mère de Clémence se trouve être une concertiste internationale. Tout ceci fait un peu beaucoup d’autant plus que les personnages ont trop souvent tendance à s’écouter parler et à réciter leur leçon : le style est parfois lourdement didactique, les informations, sans doute intéressantes, arrivent de façon peu naturelle. Cette maladresse n’est guère rattrapée par l’intrigue criminelle mollasse. Cela se laisse lire finalement mais il est peu probable que je lise le deuxième épisode de cette série que l’on m’a prêté avec le premier.
Stieg Larsson, La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette, Millénium 2, Actes sud
Dans ce deuxième épisode de la trilogie Millénium, c’est Lisbeth Salander qui se retrouve au coeur de l’action. Trois personnes ont été assassinées et les empreintes de Lisbeth retrouvées sur l’arme du crime. Elle devient alors l’ennemie publique n°1, traquée par toutes les polices du pays, présentée dans la presse à scandale comme une demeurée psychopathe. A Millénium Mikael Blomkvist (Super Blomkvist) ne croit pas à sa culpabilité et mène l’enquête. Il a en arrière-plan une investigation plus vaste sur le commerce du sexe et la traite des prostituées d’Europe de l’est.
Si on retrouve comme précédemment la même écriture parfois un peu fastidieuse, inutilement énumérative (Lisbeth fait ses courses : « Elle acheta du shampoing, du dentifrice, du savon, du lait caillé, du lait, du fromage, des oeufs, du pain, des petits pains à la cannelle congelés, du café, des sachets de thé, des cornichons, des pommes, un pack géant de Billys Pan Pizza et une cartouche de Marlboro light. Elle paya avec sa carte Visa. »), ce numéro 2 est un vrai thriller avec du suspens et un secret d’Etat. Je l’ai dévoré.
C’est intéressant aussi de découvrir en filigrane des aspects de la culture suédoise. J’ai remarqué ainsi que la question des éventuelles inégalités de traitement entre hommes et femmes était très présente. Je m’inscris illico pour le tome 3.
Paul Harding, La taverne aux oubliés, 10-18
A La Nuit de Jérusalem, taverne du quartier de Southwark à Londres, en cette année 1380, les morts violentes se succèdent. Il semble que tout cela ait un lien avec le vol d’un trésor 20 ans plus tôt. Frère Athelstan, le secrétaire du coroner de Londres sir John Cranston, mène l’enquête.
J’ai été prise d’une soudaine envie de lire un livre dont l’action se déroule au Moyen-âge. J’avais laissé de côté ce dernier épisode d’une série qui ne me convainc qu’à moitié et j’ai rattrapé mon retard. Mon opinion n’a pas changé. C’est facile à lire mais pas vraiment palpitant. Voilà toujours mon envie de Moyen-âge étanchée pour le moment.
Eliot Pattison, L’oeil du Tibet, 10-18
Me revoilà, près d’un mois plus tard…
Septembre a été pour moi l’époque de la reprise du travail et mon rythme de lecture s’en est ressenti, d’autant plus que j’avais choisi un ouvrage qui ne se lit pas tout seul. J’ai apprécié cette aventure du Chinois Shan au Tibet mais sans doute pas autant que si j’avais été plus disponible. La lecture décousue a fait que j’avais parfois du mal à reprendre le fil du récit.
Voici maintenant de quoi il s’agit : notre héros est chargé de rapporter dans la vallée de Yapchi l’oeil de pierre d’une divinité qui avait été volé par des troupes chinoises au début du 20° siècle, durant le règne du 13° dalaï-lama (celui que rencontre Sherlock Holmes dans Le mandala de Sherlock Holmes). Dans la-dite vallée un consortium américain prospecte à la recherche de pétrole. Ils sont proches du but et le mode de vie traditionnel des paysans du coin va s’en trouver détruit. Au milieu de tout cela le pauvre Shan est un peu dépassé, porté par les circonstances (ou les dieux ?) plutôt qu’agissant.
Dans cet épisode comme dans les deux précédents Eliot Pattison montre bien avec quelle brutalité la Chine opère au Tibet. Il y a d’abord les violences officielles : les monastères détruits, les moines dont on a coupé les pouces au sécateur pour les empêcher de dire leur rosaire, les enfants enlevés à leurs parents pour être élevés dans la doctrine communiste… Il y a aussi les violences liées à l’isolement : loin de Pékin le Tibet est considéré par nombre de Chinois qui y officient comme une nouvelle frontière où qui sait jouer des coudes peut s’enrichir ou monter en grade rapidement.
Jamyang Norbu, Le mandala de Sherlock Holmes, Picquier
Où était Sherlock Holmes quand tout le monde le croyait mort après sa disparition dans les chutes de Reichenbach ? Il le dit lui même à Watson dans La maison vide : « J’ai voyagé pendant deux ans au Thibet, et me suis occupé à visiter Lhassa où j’ai passé quelques jours en compagnie du lama en chef. Vous avez peut-être entendu parler dans les journaux des remarquables explorations d’un Norvégien du nom de Sigerson, mais je suis sûr qu’il ne vous est jamais venu à l’esprit que vous receviez des nouvelles de votre ami. »
En Inde, Jamyang Norbu a retrouvé le récit des aventures de Sherlock Holmes au Tibet, rédigé par son compagnon de voyage, Hurree Chunder Mookerjee, par ailleurs personnage de Kim.
Sherlock Holmes, Kim, les références littéraires sont nombreuses dans ce roman. L’auteur connaît manifestement fort bien l’oeuvre d’Arthur Conan Doyle. Le résultat en est une lecture plaisante bien que la fin soit un peu trop mystique à mon goût : âme qui change de corps et forces de l’esprit qui font voler des objets. En attendant tout ça m’a donné envie de reprendre une dose de Tibet.
Stieg Larsson, Les hommes qui n’aimaient pas les femmes, Millénium 1, Actes sud
Il y a quarante ans Harriet Vanger, 17 ans, membre d’une famille d’industriels suédois, a disparu sans laisser de traces dans des conditions improbables. Henrik Vanger, l’oncle chez qui elle vivait, pense qu’elle a été assassinée et que son assassin se moque de lui car depuis, chaque année, pour son anniversaire, il reçoit par la poste une fleur séchée sous verre ainsi qu’Harriet avait coutume de lui en offrir.
Henrik Vanger se fait vieux et aimerait s’assurer avant de mourir que tout a bien été fait pour retrouver l’assassin d’Harriet. Il embauche Mikael Blomkvist, journaliste économique à Millénium qui vient d’être condamné à trois mois de prison pour diffamation. Sa mission : reprendre tous les éléments de l’enquête et vérifier que rien n’a été négligé.
Alors voilà, depuis que j’en entendais parler sur les blogs et ailleurs, je l’ai lu à mon tour. Je l’avais réservé à ma bibliothèque depuis trois mois et je craignais un peu qu’il ne se libère au mauvais moment pendant mes vacances mais non, il m’attendait à mon retour. Bon, c’est pas mal mais je n’en ferais pas des folies non plus. J’ai trouvé le démarrage bien long. Une fois que Mikael a découvert l’indice qui lui permet d’avancer ça commence à devenir plus palpitant. Il y a beaucoup de précisions techniques. Elles m’ont intéressées quand il s’agit de montrer le travail de fourmi que peut être une enquête, beaucoup moins lorsque l’auteur détaille comment pirater un ordinateur ou comment trafiquer un compte en banque domicilié dans un paradis fiscal.
Ca se passe en Suède et ça a donc un côté exotique pour moi qui ne connaît rien à ce pays ou à sa littérature (à part Fifi Brindacier) à laquelle il est régulièrement fait référence.
Les héros sont attachants, particulièrement Lisbeth Salander, une jeune surdouée asociale qui devient l’assistante de Mikael. J’ai envie de savoir ce qu’elle devient.
Ca n’est pas très bien écrit.
Le bilan c’est que j’ai réservé le tome 2 en allant rendre le 1. Il y trois personnes inscrites avant moi mais rien ne presse. Charlie Bobine trouve que c’est de mieux en mieux en avançant et Gambadou confirme que le 2 démarre plus rapidement.