
Entre sa précédente aventure et la présente le procureur Teodore Szacki à divorcé et obtenu sa mutation en province à Sandomierz. Il s’imaginait que ce changement lui permettrait de « séduire des filles dans les discothèques, courir le long du fleuve chaque matin, se délecter de l’air frais, vivre des aventures et des moments de ravissement et, pour finir, rencontrer le véritable amour de sa vie et vieillir à ses côtés dans une maison recouverte de vigne (…) ». Six mois plus tard il est bien obligé de reconnaître qu’il s’est trompé et il est en fait complètement déprimé. A un point que je me demande d’ailleurs si son suicide social n’est pas en fait plutôt une conséquence qu’une cause de sa dépression.
Heureusement pour Szacki, les circonstances vont lui présenter un travail apte à lui redonner goût à la vie : un crime. Et un crime horrible en plus. La victime a été égorgée et vidée de son sang. A côté du cadavre est déposé un couteau sacrificiel juif qui rappelle la vieille légende du sang dont Sandomierz est un épicentre : les Juifs sacrifieraient des enfants chrétiens et utiliseraient leur sang pour confectionner le pain azyme. On subodore une provocation antisémite et le mari de la victime est le premier suspect mais quand il est lui-même assassiné, l’affaire se complique.
Une affaire bien compliquée, peut-être un peu trop pour être tout à fait crédible, mais qui a le mérite d’interroger le vieux fond antisémite de la Pologne. Le héros, et son auteur derrière lui, sont très clair là-dessus : il est urgent de passer à d’autres relations. Par contre ce que je déplore c’est tout un tas d’autres préjugés, filés bien régulièrement et sans beaucoup de recul. Teodore Szacki est un mysogyne -ce que j’avais déjà aperçu dans le premier roman. Ses collègues de travail, habillées de façon sévère, sont des femmes « frigides ». Elles sont procureures. Il voudrait quoi ? Qu’elles viennent au bureau avec un nez rouge ?
Quelques stéréotypes concernant les homosexuels, que l’on pourrait reconnaître à leur « garde-robe soignée », à la décoration de leur maison, « élégante sans être tape-à-l’oeil » et à leur démarche exagérée m’agacent aussi et je suis choquée par l’idée selon laquelle les Algériens de France « brûl[ent] des voitures, s’organis[ent] en mafias et viv[ent] du trafic des stupéfiants ».
Des idées qui me déplaisent et pourtant le personnage a aussi des côtés sympathiques et j’en arrive à le trouver attachant malgré tout. Finalement c’est le talent de l’auteur d’avoir réussi à créer un héros dont les contradictions font l’épaisseur. Comme une vraie personne, quoi.
