
Didier Eribon est né en 1953 à Reims dans une famille ouvrière pauvre. Il est le premier de sa famille à avoir poussé ses études au-delà de la scolarité obligatoire. A vingt ans il s’installe à Paris et cesse de fréquenter ses parents et ses frères. Il ne reprend contact avec sa mère que des années plus tard, quand son père, atteint d’Alzheimer, est placé en ehpad. Ce Retour à Reims est l’occasion pour l’auteur d’analyser son rapport à sa classe sociale d’origine. Lui qui pensait que c’était l’homophobie de son père qui l’avait fait fuir sa famille prend conscience que son milieu a aussi à voir avec son départ.
Sur le récit autobiographique de son ascension sociale, Didier Eribon greffe plusieurs sujets de réflexion :
– L’histoire de sa famille. J’ai plus particulièrement retenu celles de sa grand-mère, tondue à la Libération, et de sa mère, abandonnée par la précédente à dix ans, dans l’obligation de travailler très jeune alors qu’elle souhaitait poursuivre ses études pour devenir institutrice.
– Le système scolaire inégalitaire qui ne permet pas aux enfants des classes populaires de s’élever par les études mais qui mène au contraire à la reproduction des élites. Exception à la règle, l’auteur se considère comme un « miraculé ». Il suppose que son homosexualité lui a imposé de s’extraire de son milieu pour ne pas étouffer, ce qui a permis qu’il s’astreigne aux efforts nécessaires pour se plier à la culture scolaire.
– Un sentiment d’appartenance à la classe ouvrière remontant à sa petite enfance. C’est l’occasion de dire tout le mal qu’il pense de Raymond Aron pour qui les classes ne sont pas conscientes d’elles-mêmes. C’est sans doute vrai pour les enfants de la bourgeoisie dit Didier Eribon, de même que les Blancs n’ont pas conscience de leur couleur de peau ni les hétérosexuels de leur orientation sexuelle. Il aurait pu ajouter les hommes de leur genre. J’ai moi-même compris très tôt que ce n’était pas la même chose d’être une fille plutôt qu’un garçon. Transfuge de classe, l’auteur explique les efforts qu’il a fait pour gommer les signes de son origine sociale.
– Le vote populaire, hier largement en faveur du parti communiste, aujourd’hui pour le RN. D’après lui la gauche a trahi le peuple qui ne se sent plus représenté par elle. En quoi a consisté cette trahison ? Je ne l’ai pas bien compris. Sur ce point particulier je dois dire que l’auteur m’a perdue.
– La socialisation dans la sous-culture gay, point que j’ai trouvé particulièrement intéressant, et les solidarités communautaires.
J’ai trouvé que c’était un livre bien écrit, intelligent et plutôt accessible parce que l’auteur illustre son propos de son cas personnel.
L’avis d’Ingannmic.
Cette lecture est ma première participation au défi Juin, mois des fiertés.
