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L’histoire du dernier esclave américain
Barracoon : le baraquement où sont enfermés les Africains capturés avant leur déportation comme esclaves vers l’Amérique.
Zora Neale Hurston (1891-1960) était une écrivaine et anthropologue afro-américaine. En 1928 elle mène une série d’entretiens avec Cudjo Lewis, alias Olualé Kossola, son nom africain, dernier survivant africain connu du dernier navire négrier américain, la Clotilda. Elle en tire Barracoon qu’elle ne parvient pas à faire éditer. Il l’est pour la première fois en 2018.
Kossola est capturé à 19 ans en 1859 et déporté vers les Etats-Unis. L’esclavage n’y est pas aboli mais la traite atlantique est illégale depuis 1808. Cependant elle perdure clandestinement. En 1928 Kossola se souvient bien de sa jeunesse africaine et les récits qu’il en fait occupent la majeure partie de Barracoon. Il reste esclave cinq ans avant que la guerre de Sécession ne lui rende sa liberté. Son désir, et celui des autres Africains libérés avec lui, est de rentrer en Afrique. Ils commencent à mettre de l’argent de côté dans ce but mais réalisent vite qu’ils ne pourront pas se payer ce retour. Ils se résolvent alors à s’installer sur place -en Alabama. Sur des terres achetées à leur ancien maître (!) ils reconstituent une petite Afrique en construisant le village d’Africatown. Ce sont ces derniers aspects qui m’ont le plus intéressée. Ils sont cependant peu développés.
Alors que cinq ans après sa capture Kossola aurait pu refaire sa vie en Afrique, retrouver des proches sans doute, rien n’est mis en place localement pour aider les anciens esclaves désireux de rentrer chez eux. 70 ans après sa déportation Kossola exprime la douleur commune à beaucoup d’exilés quand ils pensent à leur terre natale. C’est pourquoi il est important pour lui de parler de l’Afrique à Zora Neale Hurston. Il se considère d’abord comme un Africain c’est pourquoi il est assez peu question de ses conditions de vie comme esclave. Ce livre n’est pas un document sur l’esclavage mais un document sur l’état d’esprit d’un ancien esclave.
Sur un ouvrage de 245 pages le récit de Kossola rapporté par Zora Neale Hurston en compte un peu plus de 100. Le reste est occupé par des préface, introductions (de l’autrice, de l’éditrice), postface et annexes. Je comprends que ce texte et Zora Neale Hurston sont importants dans l’histoire et la culture des afro-américains. Cette lecture m’a donné envie d’en savoir plus sur l’histoire de la fin de l’esclavage aux Etats-Unis.
L’avis de Kathel.
Une lecture qui participe au défi Mois de l’histoire des afro-américains organisé par Enna.
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Descendant : les héritiers d’Africatown. En cherchant des informations sur Africatown je découvre qu’il existe sur Netflix un documentaire de Margaret Brown paru en 2022. Entre 2018 et 2020, Margaret Brown est allé interroger les habitants d’Africatown, descendants des fondateurs, sur leur héritage.
Cudjo Lewis et les autres fondateurs d’Africatown étaient tous des anciens esclaves déportés aux Etats-Unis sur la Clotilda. Au moment où ils ont obtenu leur liberté ils avaient passé la majeure partie de leur vie en Afrique et se considéraient comme des Africains. Cet héritage africain s’est transmis à leurs descendants.
Africatown forme un quartier de la ville de Mobile. Il est entouré par des industries polluantes qui affectent la santé de ses habitants. Ces industries ont été construites sur des terrains appartenant à la famille Meaher dont les membres sont des descendants des frères Meaher qui avaient affrété la Clotilda, dernier navire négrier américain. Ainsi, aujourd’hui encore, la famille Meaher pourrit la vie des habitants d’Africatown comme autrefois ses ancêtres ont pourri la vie des ancêtres des habitants d’Africatown. Les Meaher n’ont pas répondu aux demandes de la réalisatrice.
A son arrivée aux Etats-Unis la Clotilda a été coulée par les Meaher pour effacer cette preuve de leur crime. Depuis la fin du 20° siècle des historiens ont cherché à retrouver l’épave mais la famille Meaher a tenté de les en empêcher.
Ce documentaire aborde aussi la question de la mémoire de l’esclavage : comment faire vivre cette mémoire sans qu’elle devienne une attraction touristique vidée de son sens et sans que les Afro-américains soient dépossédés de cette mémoire.
Un intéressant documentaire qui permet d’aborder la mémoire de l’esclavage du point de vue des principaux intéressés. Il montre bien que cet héritage est encore très vif aux Etats-Unis.
J’avais repéré le premier, mais ne connaissais pas cette histoire d’Africatown…
Sa découverte est un des intérêts du livre.
Je retiens le livre, un témoignage précieux… mais 90 ans pour qu’il soit édité, c’est dingue..
N’est ce pas ? Elle est morte pauvre, a été enterrée dans une tombe anonyme, c’est la romancière Alice Walker qui la sort de l’oubli dans les années 1970.