« Sa majesté défend aux officiers de ses vaisseaux de mener des femmes à bord pour y passer la nuit et pour plus longtemps ».
Rose de Freycinet (1794-1832) était la femme de Louis de Freycinet (1779-1842), capitaine de vaisseau qui commanda une expédition d’exploration scientifique française en 1817-1820. A bord de la corvette l’Uranie embarquent divers cartographes, dessinateurs, astronomes, botanistes, élèves officiers… et Mme de Freycinet. Cette dernière considère en effet qu’il est de son devoir de femme mariée de suivre son mari partout. Ce n’est pas autorisé pourtant aussi, avec la complicité de celui-ci, monte-t-elle à bord incognito, habillée en garçon et les cheveux courts. Son identité est révélée à l’équipage à Gibraltar, première escale du bateau. Pendant son voyage Rose de Freycinet a régulièrement écrit à sa cousine et amie, Caroline de Nanteuil de la Norville. Ce sont ces lettres, sorte de journal de voyage, qui constituent ce récit. Rose de Freycinet est la première française à accomplir une circumnavigation.
Dans ses lettres Rose de Freycinet raconte la vie à bord, ses traditions et son confort spartiate mais elle s’étend surtout sur les escales où l’on peut rester jusqu’à deux mois. Quasiment rien sur les recherches scientifiques qui justifient le voyage, un peu sur les rencontres avec les sauvages, l’essentiel porte sur les mondanités. Le commandant et son épouse sont en effet reçus par les élites des colonies où ils abordent. On donne des réceptions et on organise des parties de campagne. Rose commente tout cela pour sa cousine, juge des élégances, des manières et des apparences de ses hôtes. Ses goûts sont ceux d’une grande bourgeoise : elle aime l’opulence non ostentatoire, la richesse alliée à la simplicité. Il me semble que ses préjugés de classe sont plus importants que ses préjugés de « race ». Au sujet des autochtones elle me surprend parfois par des réflexions moins convenues qu’à son habitude. Ainsi à propos de personnes qui l’observent en cachette : « nous devons en effet, leur paraître aussi étranges qu’ils nous semblent l’être : c’est une réflexion que j’ai souvent l’occasion de faire ».
Le 14 février 1820, l’Uranie fait naufrage et s’échoue sur un îlot inhabité des Malouines où l’équipage survit deux mois avant d’être secouru. Il fait froid et humide, on se nourrit de biscuit mouillé et du produit de la chasse : chevaux et veaux marins principalement. Dans ces circonstances difficiles je la trouve courageuse et pleine d’ingéniosité.
Le journal de voyage est suivi d’annexes : un portrait de Rose de Freycinet et un récir du naufrage de l’Uranie par Jacques Arago -le frère de François- qui participa à l’expédition en tant qu’illustrateur ; une autre relation du naufrage par Louis de Freycinet. J’aime particulièrement les textes de Jacques Arago, écrits dans un style vivant et pittoresque.
J’ai beaucoup apprécié cette lecture, la découverte de ce petit monde, le mélange d’assurance et de spontanéité de l’autrice.
A la lecture je comprends que ce n’est pas l’intégrale des lettres de Rose de Freycinet qui nous est présentée là : certaines allusions renvoient en effet à des informations précédentes qui manquent. La notice Wikipédia de l’autrice confirme cette impression. Ce n’est pas contre pas précisé dans la préface.
quelle femme ! quel dommage qu’elle n’est fait que suivre son mari , elle me semble capable de beaucoup plus que ça, comme les jeunes femmes qui font aujourd’hui le tour du monde en solitaire sur des voiliers !
Elle a fait preuve d’un courage certain. Va savoir jusqu’où elle aurait pu aller à une autre époque ?
Intéressant, ça me rappelle une autre femme ayant suivi son mari sur son bateau, et costumée en homme. Bien évidemment je n’ai plus le nom Botaniste? Ah voilà, Jeanne Barret. Ce serait la première?
Mais oui ! Jeanne Baret qui est antérieure à Rose de Freycinet est dite par Wikipédia première femme à avoir accompli une circumnavigation. Et alors ? Mon information pour Rose de Freycinet vient de la préface de ce livre, décidément insuffisante.