« Ils ont raison, bien sûr, ceux qui disent que je n’étais pas une femme faisant semblant d’être un homme : j’étais quelque chose de bien plus choquant -j’étais une femme qui avait arrêté de faire semblant d’être autre chose, une femme qui n’était qu’une personne, l’égale de n’importe qui d’autre- en étant simplement moi-même »
Née à la fin du 18° siècle, Margaret Perry a 15 ans quand elle accepte de se travestir en garçon pour pouvoir faire des études de médecine, interdites aux filles à l’époque. Elle prend alors l’identité de Jonathan Perry qu’elle ne quittera plus jusqu’à sa mort. Les études de Jonathan à Edimbourg sont l’occasion pour lui de se mettre dan sla peau de son personnage et pour l’autrice de nous présenter le fonctionnement de la faculté au début du 19° siècle avec ses cours privés payants. Je me trompe ou c’est une pratique qui a toujours lieu ?
Devenu médecin militaire, Jonathan est affecté au Cap en 1816. Il y fait la connaissance du gouverneur Lord Somerton et de sa famille qu’il fréquente bientôt assidûment.
Ce roman est inspiré d’une histoire vraie : celle du Dr James Barry, né Margaret Ann Bulkley à la fin du 18° siècle et mort en 1865. Sa biographie est mal connue et son identité de genre a donné lieu à diverses spéculations : femme travestie, homme trans, personne intersexuée ? L’autrice a choisi de mettre l’accent sur la question du genre. Son personnage expérimente la liberté de pouvoir être profondément soi-même, en dehors des attentes de la société à l’égard des femmes :
« De toutes les découvertes excitantes faites durant ces années à l’université, la plus belle fut celle de la plus grande des libertés pour les hommes : ne pas être obligé de plaire. Avoir le droit de céder à la mauvaise humeur et à la détestation, d’éprouver ce que je voulais. Sans m’en excuser. »
« L’un des grands plaisirs qu’il y avait à vivre une existence d’homme était de ne pas avoir à écouter les hommes en silence. Ils sont peu nombreux à apprécier le son d’une autre opinion que la leur ; je n’hésitai pas à avancer la mienne. »
J’ai trouvé cette réflexion excellemment et finement menée. C’est l’intérêt principal du roman pour moi.
En même temps, tout le volet historique est aussi très intéressant. E. J. Levy nous présente la vie et les relations sociales au Cap, colonie britannique, ainsi que l’état de la médecine à l’époque et les efforts de Jonathan/James pour améliorer les hôpitaux du Cap et réguler l’offre médicale au profit des malades. Elle dote son personnage d’opinions avancées en ce qui concerne la colonisation.
On peut sans doute regretter que l’autrice ait consacré beaucoup de place à la romance entre Perry et le gouverneur Somerton et ait borné son récit à la mort de ce dernier alors que dans la vraie vie Barry a survécu plus de trente ans à Somerset et a exercé dans de nombreuses autres colonies britanniques. Il me semble que cette focalisation se justifie par l’accent sur l’identité de genre.
Enfin j’ai apprécié la belle écriture, le style calqué sur celui du début du 19° siècle (l’autrice s’est inspirée de Jane Austen) et les descriptions des paysages et des sentiments. C’est une lecture que j’ai beaucoup aimée.
Les avis de Keisha et Je lis, je blogue.
Le sujet m’intéresse beaucoup, mais d’autres lecteurs ont je crois exprimé le même bémol que toi sur l’importance de la romance, et je crains que cela gâche ma lecture.. à voir..
L’importance de la romance m’a peu gênée. Je la mentionne parce que je l’ai vue citée comme problématique dans d’autres comptes rendus.
Ah nous ne sommes plus assez romantiques! ^_^Quant à l’identité de genre, oui, oui, intéressant, mais j’aurais aimé plus de détails sur le travail de médecin là bas, et puis sa vie après l’Afrique du sud.
D’accord avec toi sur le travail de médecin et la vie après l’Afrique du sud.
J’ai apprécié aussi cette lecture. Je n’avais pas relevé spontanément le fait que la romance prend beaucoup de place dans l’intrigue mais je suis d’accord avec les commentaires des autres bloggeurs sur ce sujet. Bref, ce n’était pas rédhibitoire pour moi même s’il aurait été intéressant de parler davantage de la vie de l’héroïne après son séjour en Afrique du Sud.
Tout pareil pour moi.
Il me tente bien même s’il y a un peu de romance, ça ne fait pas de mal une fois de temps en temps si le reste est intéressant 🙂.
Je l’ai trouvé intéressant.