Mohamed Kacimi est né en 1956 à El-Hamel près de Bou-Saâda, en Algérie, dans une zaouïa, un lieu saint soufi, fondée au milieu du 19° siècle par un de ses ancêtres. L’auteur est donc issu d’une aristocratie religieuse éclairée. A l’école il découvre la langue française, découverte fondamentale pour lui : « Cette langue était donc humaine, vulnérable, elle était langue d’enfants et de rêves. Elle m’a permis, pour la première fois, d’utiliser la première personne du singulier, « Je », sans la faire suivre de la traditionnelle formule : « Que Dieu me préserve de l’usage d’un pareil pronom, car il est l’attribut du diable. »
A partir de ce jour allait commencer ma longue transhumance vers un autre imaginaire.
Je n’ai point quitté une langue maternelle mais une langue divine. La langue français est devenue pour moi la langue natale du Je, langue de l’émergence pénible du Moi. Il ne s’agit point de bilinguisme, ni de déchirement. Le partage est clair. A ma langue d’origine je donne l’au-delà et le ciel ; à la langue française, le désir, le doute, la chair. En elle, je suis né en tant qu’individu. (…)
Je n’écris pas en français. J’écris en « moi-même ». »
Les premiers chapitres du livre sont consacrés aux jeunes années de l’auteur. J’ai trouvé très intéressant ce que j’ai appris sur la vie dans la zaouïa. Je ne savais pas qu’il y avait des confréries soufies en Algérie. Il est beaucoup question de l’indépendance du pays. Enfant à El-Hamel Mohamed Kacimi ne comprend pas pourquoi il doit aller à l’école puisque maintenant les Algériens sont libres. Adolescent puis étudiant à Alger il constate la corruption et les abus de pouvoir à tous les niveaux. Il est particulièrement critique envers Boumédiène et sa politique d’arabisation forcée. En 1982, Mohamed Kacimi quitte l’Algérie pour la France. La suite de l’ouvrage est consacrée à des récits de voyage dans le monde arabo-musulman : la Mecque (1991), Sanaa, le Caire (2004), Alger (2003), Beyrouth, Jérusalem. Le recueil est paru en 2008 mais ces textes sont d’époques diverses, sans doute pour certains la reprise d’articles pour Actuel où l’auteur a travaillé. La préface ne le dit pas. Lors de ces voyages Mohamed Kacimi a constaté la montée de l’islamisme. Il s’inquiète des progrès de cet obscurantisme générateur de violences.
Mohamed Kacimi écrit bien, il a le sens de l’humour et de la formule assassine. C’est souvent très plaisant à lire. J’ai été fort intéressée par les points historiques qu’il fait sur le village de son enfance, sa famille ou les villes où il se rend. Il me semble par contre que, dans sa critique de l’islam, l’auteur manque parfois de nuance. C’est notamment le cas quand il dit que la confrontation et l’islam « dure depuis les croisades. De Jérusalem à Lépante en passant par Constantinople, l’islam sent, en Europe, l’épée, la poudre et le sang. » En ce qui concerne les croisades, ce sont quand même les Européens qui ont commencé, si je ne m’abuse…
L’avis d’Henri.
Je lis je blogue le 16 avril 2024 :
Le sujet est intéressant. La première partie du roman m’a fait penser un peu à l’autobiographie d’Azouz Begag, « Le Gone du Chaâba »
Réponse :
Du fait de ce qu’il dit sur la langue française, peut être ?
Luocine le 16 avril 2024 :
voici un livre que j’aimerais bien lire
Réponse :
Il complétait bien ma précédente lecture.