Neel Sarath pensait avoir mis suffisamment de distance entre lui et sa famille indienne en étudiant et en s’installant définitivement à San Francisco comme médecin anesthésiste. Il croyait pouvoir échapper aux sollicitations de ses parents qui souhaitent avant tout le voir marié avec une compatriote de la bonne caste. Ce qu’il veut, lui, c’est s’intégrer dans son nouveau pays, intégration qui, pense-t-il, passe par une relation avec une femme blanche. C’est sa secrétaire, Caroline, qui joue ce rôle. Cependant, à l’occasion d’un voyage dans son pays d’origine, il est piégé et ne peut refuser d’épouser Leila sous peine de ternir l’honneur familial.
Pour la mère de Leila qui tente de caser son aînée depuis des années la demande de la famille de Neel est un soulagement. Sa fille est certes belle et intelligente mais elle a 30 ans et pas de dot. Qu’elle épouse un médecin résidant aux Etats-Unis était donc inespéré. Leila quant à elle est heureuse d’avoir été choisie par un homme qui, jusqu’à présent, refusait toutes les propositions. Elle déchante dès son arrivée aux Etats-Unis quand il apparait que Neel n’a pas l’intention de la traiter en épouse. Mais ce que Neel doit encore découvrir c’est que Laila n’est pas une simple potiche et qu’elle a aussi son mot à dire.
On a compris dès le début que tout se terminerait au mieux donc pas de surprise à cette lecture. J’apprécie particulièrement les scènes qui se déroulent en Inde et dont les descriptions réveillent en moi des souvenirs d’odeurs, de saveurs, d’ambiances. Tout ce qui se passe aux Etats-Unis est moins exotique et aurait pu être raccourci un peu à mon avis.
Le propos d’Anne Cherian est de défendre le mariage arrangé ou du moins de nous le présenter comme une option acceptable. Je retrouve l’argument déjà rencontré dans des Bollywwood : en Occident vous considérez le mariage d’amour comme supérieur et pourtant un très grand nombre se termine par un divorce. L’auteur est en même temps dans une position un peu difficile car elle sait ce qu’on peut lui opposer et tente d’évacuer ces critiques d’une façon qui ne doit même pas la convaincre elle-même. La jeune mariée harcelée par sa belle-mère ? Celle-ci a le bon goût de mourir rapidement et ensuite c’est le bonheur. La femme trompée ? Elle conquiert son mari. La femme battue ? Elle puise sa consolation dans l’idée qu’elle fait son devoir.
En ce qui me concerne je suis convaincue que les mariages arrangés vont de pair avec le statut inférieur des femmes qui ont plus à gagner qu’à perdre à leur émancipation. Maintenant, si je mets de côté ma sensibilité féministe, je reconnais que ce roman facile à lire était bienvenu à un moment où j’avais besoin de quelque chose de léger. J’ai parlé plus haut de Bollywood, c’est exactement cela, ça pourrait faire un scénario de film indien. Ne manquent plus que les chants et les danses.