En 1991, à la veille d’une opération, Sala Kirschner, juive américaine d’origine polonaise, confie à sa fille Ann une boîte contenant sa correspondance et des souvenirs de la période de la deuxième guerre mondiale. Ann Kirschner découvre alors que sa mère, encore toute jeune fille, a été internée dans des camps de travail forcé des nazis en Pologne. Sala Garncarz « faisait en effet partie des cinquante mille esclaves juifs, hommes et femmes confondus, tous jeunes et en bonne santé, déportés depuis l’ouest de la Pologne et considérés comme la propriété de l’Organisation Schmelt, une division SS créée peu après l’invasion polonaise par les Allemands ».
Cette Organisation Schmelt je la connaissais sans savoir son nom, par Oskar Schindler (La liste de Schindler au cinéma). J’ai découvert que ses usines faisaient partie de ce réseau.
Sala est la plus jeune d’une famille de onze enfants de Juifs pieux et pauvres de Sosnowiec, non loin de Cracovie (ce qui manque absolument dans ce livre c’est une carte pour situer les endroits cités). En octobre 1940 la famille reçoit une réquisition pour Raizel, une autre de ses filles, à aller en camp de travail. Or Raizel est une intellectuelle myope et peu résistante. Tous acceptent donc la proposition de Sala de la remplacer. Sala a 16 ans. C’est une adolescente dynamique a qui le carcan familial commence à peser. Ce qui me frappe c’est que d’une certaine façon la déportation a aussi été pour Sala une chance. Cela lui a permis de prendre ses distances avec sa famille (de façon radicale et brutale, certes) et au final de choisir une nouvelle vie.
Jusqu’à la fin de la guerre Sala va connaître différents camps de travail. Elle y est employée au ménage, au secrétariat, à la couture. Les détenus sont autorisés à correspondre avec leur famille ou leurs amis et Sala conserve soigneusement les lettres qu’elle reçoit et des photos en souvenir qui la relient à ceux qu’elle aime. Ce trésor est clandestin, le courrier n’était pas censé être gardé. C’est à partir de ces documents et des souvenirs de sa mère que Ann Kirschner nous raconte son histoire. Elle a recherché aussi ce qu’il était advenu des membres disparus de la famille Garncarz (seules les trois plus jeunes soeurs ont survécu) et présente également les persécutions antisémites à Sosnowiec.
Je n’aime pas le sous-titre « Dans l’enfer des camps de travail nazis » parce que plus que sur le travail et l’organisation des camps Ann Kirschner met l’accent sur les relations entre les prisonniers, la solidarité qui permet de tenir, le courage et la volonté de Sala. C’est une période et des événements tragiques mais ce n’est pas un livre larmoyant.