En 1942 Clément Duprest, âgé d’une vingtaine d’années, intègre les Brigades spéciales, les Renseignements généraux de l’époque. Xénophobe et antisémite c’est avec conviction qu’il fait son travail de renseignement, de filatures et d’arrestations. Néanmoins il est convaincu qu’il ne fait pas de politique car il n’est encarté nulle part. A la Libération, grâce au soutien d’individus qui ont tous leurs bonnes raisons, Duprest échappe à l’épuration et reprend rapidement du service pour le nouveau gouvernement. On le suit tandis qu’il organise le noyautage d’organisations communistes, qu’il neutralise des partisans du FLN pendant la guerre d’Algérie, qu’il surveille les étudiants en mai 68, qu’il intervient pour que Coluche retire sa candidature aux présidentielles. Il est partout, cet homme. Il prend sa retraite en 1981.
Voilà un roman qui ne donne pas une image très positive de notre république. L’épuration a consisté à faire sauter les fusibles trop visibles ou qui s’étaient par trop salis les mains. Les autres ont pu continuer à exercer leurs compétences, pratiquement dans les mêmes locaux. Quelque soit le gouvernement, il y a besoin de gens sans scrupules pour les basses besognes.
En parallèle de la vie professionnelle de Duprest, Didier Daenninckx nous décrit aussi sa vie privée plutôt morne : un mariage décevant et un fils avec lequel il a bien peu en commun pendant longtemps. Quand père et fils se retrouvent enfin il y a là aussi un fond de bassesse qui ne pousse pas à l’euphorie. Bien que son héros soit peu reluisant j’apprécie que Daenninckx ne le caricature pas et le montre presque comme un homme ordinaire. Il y a matière à réflexion dans cette lecture ceci dit j’ai trouvé que l’écriture manquait un peu de relief.