En 2001 Henry Louis Gates jr., américain spécialiste en études afro-américaines, acquiert dans une vente aux enchères le manuscrit de l’Autobiographie d’une esclave. Ce document est une rareté pour plusieurs raisons. S’il s’avère qu’il a bien été écrit par une esclave évadée, comme l’auteure se présente, il serait le premier roman écrit par une ancienne esclave. Par ailleurs ce manuscrit n’ayant jamais été publié n’a pas été retouché par un éditeur à la différence des textes écrits par des anciens esclaves que l’on possédait jusqu’à présent. Il permet donc de juger du niveau d’alphabétisation et de culture de l’auteure, sans doute autodidacte. Henry Louis Gates jr. mène donc l’enquête pour authentifier le manuscrit. Analyse chimique du papier et de l’encre, graphologie, recherches historiques pour retrouver trace des personnages cités, toutes les pistes sont explorées. Le résultat est la conviction que l’auteure est bien celle qu’elle dit être même si elle écrit sans doute sous un pseudonyme. Tout ceci est présenté dans une longue préface très intéressante.
Contrairement à ce que son titre peut laisser penser Autobiographie d’une esclave est en fait un roman. Hannah Crafts s’appuie sur son expérience personnelle mais elle s’inspire aussi de ses lectures, notamment des romans gothiques, et le résultat est très romanesque. La narratrice, Hannah, raconte son histoire depuis son enfance (comment elle a appris à lire malgré l’interdiction) jusqu’à son évasion réussie en passant par ses différents propriétaires. C’est une esclave de la maison. Elle reste près de sa maîtresse, lui sert de femme de chambre et ne travaille pas aux champs. Ce sont des conditions de vie matériellement plus facile et c’est donc ce cadre qui est décrit.
Hannah est très pieuse et s’efforce en toutes circonstances d’être une bonne chrétienne. Dans les moments difficiles de sa vie elle est soutenue par l’idée que son dieu veille sur elle. A la fin du roman les méchants sont punis et les bons récompensés d’une façon qui doit prouver l’existence d’une justice divine.
Enfin l’auteure affirme un jugement très critique sur l’esclavage et ceux qui le soutiennent. A propos d’une jeune esclave qui vient de se suicider après avoir tué son nourrisson : « Un léger spasme, un frisson convulsif, et elle était morte. Morte, Votre Excellence, président de cette république. Morte, messieurs les sénateurs si graves, qui savez faire preuve d’une telle éloquence pour parler des pensions et des torts de l’armée. Morte, messieurs les ministres du culte, qui glosez sans fin parce que les pauvres qui n’ont pas un seul instant de loisir les autres jours osent lire le journal le dimanche, et qui pourtant soutenez ou approuvez les lois permettant de telles scènes de malheur. »
J’ai trouvé cette lecture très intéressante et ça m’a donné envie de relire des témoignages d’esclaves que j’avais déjà lus il y a bien longtemps.
Lounima le 21 juin 2010 :
Je l’ai lu y a quelques temps déjà et je l’avais trouvé très intéressant. Bien écrit, ce fut une lecture agréable… Hors sujet : Bravo !! Tu as deviné mon âge ! Envoie-moi ton adresse par mail et surveille ta boîte aux lettres… 😉
Réponse :
Oui, ça a un intérêt à la fois historique et littéraire.
Hors sujet : ça alors ! Ca ne m’arrive pas souvent de gagner à un concours (ça ne m’arrive pas souvent de jouer…). Encore une fois, un très bon anniversaire !