Zhu Xiao-Mei est née en 1950. Elle joue du piano depuis son plus jeune âge et à 11 ans elle entre au conservatoire de Pékin où elle peut se consacrer à sa passion. Mais petit à petit les séances d’autocritique et de dénonciation prennent le pas sur l’enseignement de la musique, les élèves sont emmenés en vacances à la campagne pour aider les paysans dans leur travail et Xiao-Mei s’éloigne de sa famille. Bien qu’elle soit devenue une révolutionnaire convaincue elle n’en reste pas moins suspecte aux yeux du régime car chushen buhao : de mauvaise origine (bourgeoise).
En 1969, avec la plupart de ses camarades du conservatoire, elle est envoyée en camp de rééducation. Elle va y rester cinq ans. Enfin libre il lui faut énormément travailler pour rattraper le temps perdu et reprendre une carrière brutalement interrompue. A 30 ans elle quitte la Chine pour les Etats-Unis puis émigre ensuite vers la France. Le succès vient finalement, non sans difficultés et périodes de vaches maigres. Aujourd’hui elle est professeur au conservatoire national de musique et donne des récitals en France et à l’étranger.
Ce que j’ai trouvé le plus intéressant dans La rivière et son secret (par contre, pourquoi ce titre ?) c’est le récit de l’adolescence et de la jeunesse de l’auteur sous la dictature de Mao, pendant la Révolution culturelle. Zhu Xiao-Mei montre bien comment toute une génération d’artistes et d’intellectuels a été sacrifiée. Même parmi ceux qui ont survécu la plupart de ses camarades n’ont pas connu la carrière qu’ils auraient pu. Ils ont finalement laissé de côté la musique pour assurer le matériel : « La Révolution culturelle a cassé en eux tout désir d’absolu. Par une cruelle ironie de l’Histoire, elle les a changés non en communistes mais en capitalistes ! »
Zhu Xiao-Mei elle-même reste marquée à jamais : « Les séances de dénonciation collectives que j’ai subies pendant des années font que j’ai désormais peur d’être critiquée, et que je ne peux plus avoir confiance, ni en moi, ni dans les autres. Quand l’on a connu ce régime, quand à douze ans, à un âge auquel on ne peut pas être coupable, on a été forcé de faire son autocritique, qu’est-ce qu’un ami, une relation, si ce n’est quelqu’un qui demain vous dénoncera et que vous-même, vous critiquerez ? »
La suite, concernant son retour à la musique m’a moins intéressée. Il y a de longs passages sur la façon de bien jouer tel ou tel morceau. Je ne me sens pas trop concernée. Quelqu’un qui s’intéresse à la musique classique devrait sans doute mieux apprécier.