Née le 25 décembre 1918 à Moscou, Nina Lougovskaïa a tenu un journal intime entre octobre 1932 et janvier 1937. Son père est un socialiste révolutionnaire inquiété par le régime de Staline. A partir de mars 1933 son passeport intérieur lui est retiré et il ne peut plus résider à Moscou ; en novembre 1935 il est arrêté ; le 4 janvier 1937 l’appartement familial est perquisitionné et le journal intime de Nina fait partie des objets confisqués à cette occasion. S’en suit l’arrestation de la mère et des trois filles et leur condamnation à cinq ans de goulag suivie de cinq ans d’assignation à résidence dans la Kolyma. Réhabilitée en 1963 pour « manque de preuves » Nina Lougovskaïa est devenue artiste peintre. Elle est morte en 1993. Son journal intime a été retrouvé après sa mort dans les archives du NKVD ouvertes au public après la chute de l’URSS. Il est un témoignage de la vie quotidienne d’une adolescente à Moscou, au milieu des années 30.
Tout d’abord, les préoccupations de Nina sont celles, intemporelles, de nombre d’adolescentes. Elle se trouve laide, voire repoussante et envie ses soeurs aînées et ses camarades de classe. Elles, sont si mignonnes, et bien dans leur peau, et à l’aise avec les garçons. Car Nina est obnubilée par les garçons. Tour à tour elle tombe amoureuse de plusieurs garçons de sa classe, elle a le béguin pour des étudiants, camarades de ses soeurs. Elle les observe, détaillant leurs attraits physiques et leur caractère. En classe elle fait circuler des petits mots en direction de ses amies pour échanger leurs opinions sur tel ou tel.
L’école est aussi un grand soucis de Nina. Elle n’a pas de très bons résultats, est âgée de deux ans de plus que ses camarades et cherche un moyen d’en finir au plus vite avec sa scolarité secondaire. Elle alterne les périodes de découragement où elle cesse d’aller en cours et les périodes d’enthousiasme où elle décide de travailler d’arrache-pied (bien souvent, semble-t-il, cela ne dépasse pas ce stade de la décision).
Cet aspect du journal est intéressant car il montre une permanence des sentiments de l’adolescence. De plus Nina écrit plutôt bien. Cependant, au bout d’un moment, j’ai commencé à trouver que cela devenait répétitif et lassant.
L’aspect le plus intéressant du journal, c’est celui qui attiré l’oeil de la police politique : des passages entiers en ont été soulignés par un inspecteur du NKVD et ont servi de preuves confirmant les opinions contre-révolutionnaires de Nina. Quand elle écrit au sujet de Staline :
« J’ai rêvé à la façon dont je le tuerais, ce dictateur. Les promesses qu’il fait à la Russie, ce salaud, cette ordure, alors qu’il la mutile, ce vil Géorgien ! « On comprend qu’un régime totalitaire ne puisse pas laisser passer de tels propos. Mais est aussi retenu contre elle le fait qu’elle dise que, bien qu’ayant pitié d’eux, elle ne se sent aucun point commun avec le peuple et les masses ouvrières. Où les nombreux moments où elle pense plus ou moins sérieusement au suicide.
C’est au moment où le journal s’arrête, où sa vie va prendre un tour dramatique que j’aimerais le plus pouvoir suivre Nina dans sa déportation.